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Partir un jour

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Genre : Ciné région

L'Actu

Partir un jour
Genre : Comédie Musicale
Pays : France
Durée : 1h38
Réalisateur : Amélie Bonnin
Acteurs : Juliette Armanet, Bastien Bouillon, François Rollin



« Si un relais routier est installé près de l’autoroute, c’est aussi pour en partir le plus vite possible. » Cécile.

Que reste-t-il du temps qui passe, de la jeunesse ? Que reste-t-il des lieux qui nous ont vus grandir avant de partir ? Cécile, quarante ans, championne de Top Chef s’apprête à ouvrir son restaurant, loin de l’esprit du routier tenu par son père. Il n’est désormais plus qu’un souvenir du territoire de l’enfance. Le quatrième AVC de Gérard, ce père qui ne veut pas quitter les fourneaux, la pousse revenir à l’origine de sa vocation. C’est le passé qui revient, comme un fantôme bien vivant, pour la confronter à ses choix et son refus d’hier pour vivre aujourd'hui.

 Elle apprend qu’elle porte une nouvelle vie qu’elle ne souhaite pas. Gérard note toutes ses réflexions de Top Chef sur ce passé qu’elle refuse, sur ces routiers de passage à la cuisine des grands-mères. Cécile retrouve aussi Raphaël, cet ancien amour de jeunesse qui s’est, lui aussi, figé dans le temps en reprenant l’ancien garage de son père. Cécile se retrouve confrontée à bien plus que les lieux de l’enfance, à tout ce que l’on renie en croyant que le passé peut mourir. Elle comprendra que ce qui fait la jeune femme d’aujourd’hui est ancré dans l’hier.

« Il ne suffit pas de quitter les choses pour que les choses vous quittent »


Derrière cette comédie, aux dialogues parfois chantés, se cache une belle réflexion sur notre société et les transfuges de classe. Cécile, en quittant le Loir et Cher et le routier de son père, s’élève socialement. Elle tourne le dos à un monde qui n’est plus le sien. Elle pense qu’en coupant les ponts on oublie tout. Le retour au pays lui rappelle d’où elle vient. Qu’une vie, c’est la somme de tous ces évènements, bons ou mauvais. Ils nous aident à nous construire et faire nos choix dans la vie.

 Cécile rêvait sans doute d’une autre cuisine que celle des fourneaux des grands-mères. Elle s’éloigne du steak haché, de l’andouillette et de l'entrecôte, toujours accompagnée de frites, grand classique du routier. Sa mère rêve toujours de partir pour une virée en Italie, direction Venise dans le camping-car. Gérard, son père, s’imagine mourir sur scène, le nez dans les épluchures de patates. Elle retrouve sa bande de vieux copains et son amour de jeunesse. Tout le monde se confronte au présent en se remémorant le temps qui passe et nous transforme. Partir un jour s’intéresse à nos racines, à la famille, au premier amour, laissant le goût inachevé des premières fois.

Le tout avec une certaine légèreté dans la mise en scène et le poids des lieux qui perdent de leur magie, toujours meilleurs dans nos souvenirs. C’est aussi le rapport entre un père et une fille qui s’aiment mais ne savent pas forcément le dire. Partir un jour possède le charme des premiers films, celui des premières fois ineffables. Amélie Bonnin transforme le coup d’essai de son court-métrage récompensé aux Césars en une version longue. Dans ce dernier, un écrivain renoue avec son amour de jeunesse, restée caissière au pays.

Elle s’explique sur le choix des chansons populaires et ce petit air de comédie musicale. « Elles constituent un socle commun, voire un lien entre les gens d’une génération. C’est aussi pour cela que j’ai voulu faire un film avec des chansons du répertoire, parce qu’elles font appel à un patrimoine commun. Quand on les écoute, on est ramené à quelque chose de soi. Un moment, un lieu, une personne. Il suffit d’un titre pour avoir accès à une palette d’émotions. Pour cela, la musique et les chansons sont idéales ! »

On pense à un remix de Claude Lelouch, à Jean-Pierre Bacri et Agnès Jaoui pour certains dialogues, avec un soupçon de On connait la chanson d’Alain Resnais. Le choix du film pour l’ouverture du festival de Cannes est peut-être un symbole fort. Il annonce cette jeune génération de réalisatrices et réalisateurs pleins de promesses.

Ils sont à la fois, comme Cécile, nourris du passé pour mieux s’en émanciper et nous proposer des films parfois surprenants. C’est aussi continuer ce regard sur des thématiques universelles en milieu plus rural, sur une France profonde, oubliée, comme Petit Paysan, La Pampa, Vingt Dieux, Leurs enfants après eux, et bien d'autres. C’est privilégier un cinéma d’auteurs qui peut changer le monde, en écho aux discours d’ouverture du 78e festival de Cannes.

 Pour conclure, comme le disait Bertrand Tavernier : « Des cinéastes qui croient que le cinéma peut faire un peu bouger les choses, qui croient que, comme me le disait Renoir, qu’il faut faire un film en se disant que l’on va arriver à faire changer le cours de l’Histoire et en même temps, il faut avoir l’humilité de penser que si on touche deux personnes, on aura réussi quelque chose d’extraordinaire. »  
 
Patrick Van Langhenhoven
L'avis d'Aline
« Partir un jour », premier long-métrage d’Amélie Bonnin, est une œuvre délicate et émouvante qui mêle légèreté, sincérité et une touche d’humour. Présenté en ouverture du Festival de Cannes 2025, le film raconte l’histoire de Cécile (interprétée par Juliette Armanet), une cheffe parisienne qui, après l’infarctus de son père, retourne dans son village natal. Là, elle retrouve son amour de jeunesse, Julien (Bastien Bouillon), et se confronte à ses souvenirs et à ses émotions refoulées.

Le film se distingue par sa simplicité narrative, mais cette simplicité est loin d’être un défaut. Elle permet une immersion dans l’univers des personnages et une exploration authentique des thèmes du retour aux sources, de la famille et de l’amour. Les dialogues sont naturels, les situations crédibles, et la mise en scène fluide, offrant une expérience cinématographique touchante. Juliette Armanet, pour son premier rôle au cinéma, fait preuve d’une grande justesse. Elle incarne Cécile avec une sensibilité palpable, naviguant entre la force de caractère de la cheffe accomplie et la vulnérabilité de la fille confrontée à ses racines.

 Son jeu d’actrice, subtil et émouvant, apporte une profondeur au personnage et à l’ensemble du film. Bastien Bouillon, quant à lui, offre une prestation sincère. Son personnage, Julien, est à la fois ancré dans le passé et marqué par le temps écoulé, créant une dynamique intéressante avec Cécile. Inspiré par la chanson "Partir un jour" des années 90, le film intègre des moments musicaux qui, peuvent nous sortir un peu d’une émotion au premier abord, viennent l’enrichir l’émotion et appuyer la narration. Ces séquences chantées, interprétées en direct sur le plateau, ajoutent une dimension supplémentaire à l’histoire, renforçant les liens entre les personnages et leurs souvenirs partagés.

Aline Minchella

Fiche technique

    Titre : Partir un jour
    Réalisation : Amélie Bonnin
    Scénario : Amélie Bonnin et Dimitri Lucas
    Musique : P.R2B, Keren Ann, Thomas Krameyer, Germain Izydorczyk, Theo Kaiser, Emma Prat, Chilly Gonzales
    Photographie : David Cailley
    Décors : Chloé Cambournac
    Montage : Héloïse Pelloquet
    Son : Rémi Chanaud
    Production : Bastien Daret, Arthur Goisset, Robin Robles, Sylvie Pialat, Benoît Quainon
    Coproduction : Ardavan Safaee
    Société de production : Topshot Films, Les Films du Worso[2], en coproduction avec Pathé Films, France 3 Cinéma et Logical Content Ventures
    Société de distribution : Pathé Films
    Budget : 5,6 millions d'euros[3]
    Pays de production : France
    Langue originale : français
    Genre : film musical, comédie dramatique
    Durée : 94 minutes
    Dates de sortie : 13 mai 2025 (Festival de Cannes) 14 mai 2025


Distribution
    Juliette Armanet : Cécile Béguin
    Bastien Bouillon : Raphaël Tenreiro
    François Rollin : Gérard Béguin, le père de Cécile
    Tewfik Jallab : Sofiane Garbi
    Dominique Blanc : Fanfan Béguin, la mère de Cécile
    Mhamed Arezki : Eddy
    Pierre-Antoine Billon : Richard
    Amandine Dewasmes : Nathalie