Marco, l'énigme d'une vie
Genre : Biographie
Pays : Espagne
Durée : 1h41
Réalisateur : Jon Garaño et Aitor Arregi
Acteurs : Eduard Fernández, Nathalie Poza, Chani Martín
En 1999, le temps n’a pas effacé de la mémoire du pays les années noires, la terreur brune s’abattant sur l’Europe et d’un Franco sur l’Espagne. Marco en sait quelque chose. Il est venu chercher une attestation de captivité dans un de ces camps oubliés, Flossenbürg. Dans les archives, nulle trace de sa présence.
Il ignore son numéro et son nom, sans doute la vieillesse et le traumatisme. Parmi les 9000 Espagnols internés dans le camp nazi, pas de Marco. Cela ne l’empêche pas de militer pour que l’Espagne reconnaisse ses victimes déportées comme bien d'autres. Il porte la parole au sein des écoles et dans les documentaires.
Celle-ci impressionne par sa justesse et son ton. Elle suscite beaucoup d’émotion chez les enfants. Le discours est bien rodé, approuvé par les rares survivants. Marco prend la présidence de l’association des déportés de Mauthausen et réussit à obtenir la présence d’un haut représentant de l’Etat à une commémoration annuelle.
C’est la reconnaissance de l’Etat et de sa responsabilité. Benito Bermejo, un historien, demande à rencontrer Marco avec insistance avant de tout révéler. Il possède des éléments remettant en cause toute son histoire. Et si tout ceci n’était qu’un mensonge ?
Après Une vie secrète sortie en 2020, Jon Garaño et Aitor Arregi revisitent de nouveau les années franquistes à travers cette imposture. Ils choisissent une mise en scène jouant entre les retours en arrière et le présent pour montrer et démonter la construction d’un mensonge. L’affaire a fait grand bruit en Espagne, d’autant qu’avec culot, le vrai Marco tente de retourner la situation.
Il est remarquablement interprété par Eduard Fernández, très ressemblant. On se demande encore ce qui pousse cet homme à s’emparer d’une histoire qui n’est pas la sienne. Est-ce un désir de reconnaissance, d’une certaine célébrité ou de cacher une autre vérité moins glorieuse ?
L’enquête de l’historien révèle qu’apparemment, Enric Marco est en fait parti volontairement en 1941 en Allemagne comme travailleur dans le cadre d'un accord du dictateur Franco avec Hitler. Le vrai Marco aurait usurpé l'identité d’Éric Moner, un déporté, membre de la Résistance française, originaire de Figueras.Comment cet homme se fait-il passer pour un antifranquiste et un antifasciste, alors qu’il part volontairement en Allemagne ?
C’est le poids de la vérité et du mensonge qui se joue dans cette fiction proche de la vérité. L’homme est brillant et son discours véridique. Il porte un message qui fait mouche et attire l’attention sur ces Espagnols livrés à l’ennemi. Est-ce que Marco cherche une sorte de rachat par cette action ? Toute la question est là : quelles sont ses motivations ?
C’est une fois de plus pour les réalisateurs l’occasion de renouer avec une histoire qui n’en finit pas d’exhumer des morceaux d’une mémoire qui reste encore fragile. C’est aussi les dommages collatéraux sur la famille qui ignorait tout de la vérité. Le vrai Marco décède centenaire en 2022. La mise en scène reste assez classique, parfois ampoulée, à l’image du personnage roublard.
Elle maintient le suspense assez longtemps pour que le spectateur, à l’image du public espagnol, s’interroge encore. Dans notre société du mensonge où l’on voit de nombreux affabulateurs, des camelots capables de vous vendre la lune, Marco ne dépare pas. L’équilibre entre l’intime et le politique est habilement mené pour laisser à chacun sa conclusion. Finalement, Marco aura réussi à entrer dans l’Histoire en appartenant à la liste des grands usurpateurs. Pour ma part, je pense qu’il finit par croire à son affabulation et ne plus faire la différence entre le mensonge et la vérité.
Patrick Van Langhenhoven
Fiche technique
Titre : Marco, l'énigme d'une vie
Réalisation : Jon Garaño et Aitor Arregi
Scénario : Jon Garaño
Production : Atresmedia
Décors : Mikel Serrano
Costumes : Saioa Lara
Photographie : Javier Aguirre Erauso
Maquillage : Karmele Soler
Musique : Aránzazu Calleja
Pays de production : Espagne
Format : couleur
Genre : drame, film biographique, film historique
Dates de sortie : 14 mai 2025
Distribution
Eduard Fernández : Enric Marco
Nathalie Poza : Laura[15]
Chani Martín : Benito Bermejo
Sonia Almarcha : Clara
Fermí Reixach : Pere
Vicente Vergara : Gracia
Jordi Rico : Santi
Iñigo de la Iglesia : Gil
Crédit phot Epicentre David Herranz