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affiche Annecy cinéma italien 2014 : compétition fiction

Annecy cinéma italien 2014 : compétition fiction

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Genre : Festival Cinéma

L'Actu

Annecy cinéma italien 2014 : compétition fiction

La noirceur des films en compétition l’an dernier avait frappé un grand nombre de spectateurs. Pour l’édition 2014, la liste des oeuvres retenues se voulait plus éclectique, offrant au public, comédies, drames, films d’engagement civil ou de genre. A noter pour cette 32e édition la présence systématique des réalisateurs, scénaristes, producteurs, actrices et acteurs des films en compétition. Les interviews et débats organisés à quatre mains par le duo constitué de Jean Gili et Alain Bichon ont permis de beaux échanges entre public et cinéastes. Une 32e édition placée sous le signe de la convivialité mais aussi de la curiosité et de la solidarité : les équipes invitées ne se contentant pas d’être là pour présenter leurs films, mais assistant aussi aux projections des œuvres concurrentes.  L’amicale omniprésence d’Oreste Sachelli, délégué général du festival de Villerupt, a souligné cette volonté de promouvoir tous ensemble le cinéma italien d’aujourd’hui. Huit films étaient en compétition.

-       Perfidia de Bonifacio Angius : Sassari, Sardaigne. Angelo, 35 ans, vit chez son père, Peppino. Sans travail ni amis, sans même une copine, sa vie s’écoule, pâle et grise entre son père et un bar où l’on boit et joue tristement, une radio qui diffuse des prêches religieux et une ville dominée par la crise. Comme le déclare Bonifacio Angius venu présenter son œuvre, le film brosse le portrait de personnages communs que le réalisateur peut croiser ou voir de la fenêtre de son appartement. Peut-être même dans son miroir. Film sur le vide existentiel, le délitement des relations familiales et sociales dans l’Italie d’aujourd’hui.

 

-       Noi 4 de Francesco Bruni : Lara, ingénieur stakhanoviste et anxiogène et son ex-mari Ettore, pseudo-artiste désordonné et indolent se sont aimés passionnément. Désormais séparés, ils ont deux enfants qui ne pensent qu’à une seule chose : les remettre en contact. Scénariste attitré de Paolo Virzi, Francesco Bruni, pour sa seconde réalisation, en multipliant par deux la relation père-fils racontée dans Sciallà, nous parle d’une manière faussement légère de l’Italie d’aujourd’hui. A travers des dialogues vifs et tranchants, il crée un sous-genre de la comédie à l’italienne, entre comédie d’auteur et comédie populaire.

 

-       La mafia uccide solo d’estate (La mafia ne tue qu’en été) de Pierfrancesco Diliberto : Arturo naît à Palerme le jour-même où un chef de la mafia est élu maire de la cité. A travers son histoire d’amour qui raconte ses tentatives pour conquérir le cœur d’une de ses camarades de classe, contraint de cohabiter avec les menées criminelles de cosa nostra, il nous implique dans les événements tragiques de son île et de l’Italie. Dans La vie est belle, Roberto Begnini nous parlait de la barbarie sous la forme d’une fable. De la même manière, Pif, nom d’artiste du réalisateur, défiant ce qui pourrait paraître un sacrilège, dans un récit de formation, parle de la mafia le sourire aux lèvres,  rendant hommage à toutes celles et tous ceux qui ont payé de leur vie le combat contre la pieuvre et rappelant que se révolter est toujours possible.

 

-       Il sud è niente (Le sud n’est rien) de Fabio Mollo : Grazia, 17 ans, vit à Reggio Calabria. Son père lui a dit que son frère Pietro était mort après avoir émigré en Allemagne. Croyant reconnaître ce dernier dans une silhouette entrevue à la plage, elle part à sa recherche, se heurtant au silence obstiné de son père. Ce film énigmatique et lacunaire dans lequel une jeune femme à l’allure masculine cherche à faire émerger une vérité cachée par l’omertà vaut surtout par la précision du jeu d’une jeune actrice débutante, Miriam Karlkvist. Ses pérégrinations obstinées et muettes à la poursuite d’un fantôme laissent entrevoir au spectateur un territoire  qui se meurt, rongé par le silence et la complicité.

 

-       Il venditore di medicine (Le vendeur de médicaments) d’Antonio Morabito. Bruno est visiteur médical pour un important laboratoire pharmaceutique. Il a tissé un réseau de médecins qui, en échange de cadeaux, de voyages, de repas, prescrivent ses médicaments. Pour conserver son travail dans une période de réduction des personnels, il élabore un plan machiavélique vis-à-vis d’un oncologue, mettant en péril son propre couple. Le film de Morabito marque un retour au cinéma de dénonciation des années 60 et 70. Il met en lumière l’univers corrompu de l’industrie pharmaceutique qui fonctionne au nom du profit et transforme la santé des gens en un marché obscène et cynique. Un formidable Claudio Santamaria dans le rôle du corrupteur.

 

-       Più buio di mezzanotte (Plus noir que minuit) de Sebastiano Riso. Davide est un adolescent à part, d’allure très féminine. A quatorze ans, son identité sexuelle le tourmente et trouble son père. Abandonnant sa maison pour un parc de Catane peuplé de marginaux, il va devoir prendre seul la décision la plus difficile de sa vie. Présenté à la semaine de la critique, le premier film de Sebastiano Riso est un récit de formation aussi fragile que son protagoniste. A coups de flashbacks oppressants et dans une approche quasi documentaire ponctuée de quelques touches pasoliniennes et d’une musique pop, il dénonce avec rage ce qui opprime une adolescence pas comme les autres.

 

-       Bolgia totale (Chaos total) de Matteo Scifoni. Le vieil inspecteur Quinto Cruciani, alcoolique et drogué, laisse s’échapper Michele Loi, un jeune trafiquant psychopathe. Il a trois jours pour remettre la main sur lui alors que Loi tente d’organiser sa fuite à Portorico. « J’ai toujours eu une passion viscérale pour le film noir » déclare le réalisateur. Mettant en parallèle deux perdants qui cherchent essentiellement à survivre, le film joue sur les codes du genre et aboutit à un récit quasi archétypal négligeant délibérément le substrat social de l’intrigue.

 

-       Noi siamo Francesco (Nous sommes Francesco) de Guendalina Zampagni. Francesco, 22 ans est né sans bras. Bel étudiant modèle, il a pour ami Stefano qui ne se lasse pas de lui conter ses aventures amoureuses. Mais Francesco, contrairement à son ami, n’a jamais connu l’amour. Évoquer la sexualité d’un jeune homme handicapé pouvait paraître un défi risqué. En adoptant le ton de la comédie, Guendalina Zampagni  le relève cependant. Plus qu’un discours sur la sexualité, son film nous parle simplement de sentiments et d’amour : nous sommes tous Francesco ! Belle performance de Mauro Racanati dans le rôle du protagoniste.


Alain Claudot, Rendez-vous du cinéma italien de Reims