Frank sort de prison et espère bien récupérer son pognon. Il devra se contenter d’un dernier coup pour renflouer la mise et partir avec un pactole assuré pour sa retraite. Il s’associe avec un vieux pote pour monter un kidnapping sans risque. Francis et sa sœur Monique, habitués aux petites combines, rejoignent la bande, invités par Max. Le coup est presque parfait. Ils retiennent prisonnière Zelda, la fille d’un milliardaire qui ne rechigne pas à casquer la somme voulue pour retrouver son petit trésor. La bande se planque en Espagne dans la villa d’un barbouilleur. Il leur sert d’intermédiaire pour récupérer le grisbi. Les choses simples finissent parfois par se compliquer. La chaleur de l’été et quelques tensions pourraient bien transformer le coup en échec et mat.
Après le succès de Rififi à Tokyo et quatre scénaristes, Jacques Deray choisit un roman de James Hadley Chase, réputé difficile, pour son quatrième film. L’intrigue complexe rebute plus d’un ténor de la réalisation, mais pas le duo Deray Audiard, appuyé par des acteurs parfois à contre-emploi comme Sophie Daumier ou Georges Geret obsédé par la santé de sa mère, qui remettra tout en cause. L’entreprise semblait vouée à l’échec, le mariage d’une mise en scène axée sur le geste et des dialogues d’Audiard paraissait improbable. Le talent et le savoir-faire des deux hommes proposent au contraire une troisième voie intéressante. Le film s’ouvre et s’achève sur une séquence très noire. Michel Audiard fait sobre avec quelques réparties cinglantes dans la bouche de Belmondo. Jacques Deray s’appuie sur une réalisation au cordeau précise et soignée.
Entre les deux, nous retrouvons le style Belmondo, humour et panache pour une première collaboration avec le réalisateur. Elle en appellera de nombreuses autres. La critique n’épargne pas le film à sa sortie, qui connait un succès public malgré la concurrence de Goldfinger. Charles Chaplin ne voulait pas que sa fille tienne le rôle de Zelda. Pour sa première apparition sur grand écran, elle compose une héritière complexe et amoureuse. Le polar est un prétexte pour Jacques Deray, réalisateur de l’âme. C’est la complexité des personnages et leur évolution qu’il développe dans une montée dramatique remarquable. Il bâtit, sur une intrigue de gangsters classique, une tragédie intérieure intéressante.
Chaque personnage évolue dans une tension de l’âme qui le conduit à des actes inattendus. La mise en scène sert de décor à cet univers clos dans son décor et dans la psyché des protagonistes. Belmondo, auréolé par le succès de L’homme de Rio, compose un petit voyou inquiétant. La scène avec le gamin de la famille dévoile un mauvais garçon sympathique vite rattrapé par sa mission. Tout se joue dans une partie d’échecs où les pièces changeront de rôles fréquemment. C’est en cela qu’Un beau matin d’été gagne en richesse et devient incontournable.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus : Entretiens exclusifs autour du film (27 min)
Titre : Par un beau matin d'été
Réalisation : Jacques Deray
Scénario : M. Andriard, Georges Bardawil, Jacques Deray, Maurice Fabre, Didier Goulard et Arturo Rígel, dialogues de Michel Audiard, d'après un roman de James Hadley Chase
Producteur : Raymond Borderie
Musique : Michel Magne
Genre : Film policier
Pays : Drapeau de la France France
Année : 1965
Distribution
Jean-Paul Belmondo : Francis
Geraldine Chaplin : Zelda
Sophie Daumier : Monique
Gabriele Ferzetti : Vic Dermatt
Adolfo Celi : Van Willie
Georges Géret : Zegetti
Jacques Higelin : le motard
Jacques Monod : Lucas
Akim Tamiroff : Kramer
Claude Cerval : Jean-Pierre, le pigeon
Max : Georges Géret