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affiche 4e Festival du film policier REIMS POLAR

4e Festival du film policier REIMS POLAR

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Genre : Festival Cinéma

L'Actu

Une semaine intense vient de se clore dans la Cité des Sacres qui a vibré au rythme du polar, sous toutes ses formes avec, comme l’a annoncé le maire avec fierté, une fréquentation en hausse de 20% pour cette désormais fameuse manifestation.

En cuisine on dirait que la mayonnaise a bien pris. Ici, on dit que le festival entre dans les têtes et les cœurs et qu’il est en passe de devenir un repère rituel comme on le dit d’Angers, Dinard ou d’autres destinations chéries des cinéphiles.Comme l’an passé, on a pu choisir entre différentes sections. Les plus historiques comme Chabrol au vinaigre pour voir et revoir des classiques du grand Claude, et Second souffle qui proposait des films restaurés. Des Films noirs à l’italienne anciens et récents venaient épicer le programme.

La section Sang Neuf pour stimuler la création et la Compétition sans laquelle il n’y aurait pas de festival.
Pour les insatiables, on avait pensé à programmer quelques films hors compétition, ainsi qu’une Série Noire très prometteuse dont deux épisodes ont été diffusés avant leur passage prochain sur Polar+
Ajoutons à cela des Leçons d’actrices délivrées tour à tour par Julie Gayet et Léa Drucker, un hommage à Andrew Davis et une invitée d’honneur en la personne de Valeria Golino.

Quelques nuits (blanches) plus tard, que reste-t-il comme impressions ?
Tout d’abord, que sous la même appellation, on trouve une variété infinie de styles, de thèmes, la plupart en lien avec des thématiques de société. On voit aussi que tous les pays participent à la création de fictions jouant à cache-cache avec la loi, l’ordre, l’appât de l’argent et autres turpitudes si humaines.

Est-ce également l’air du temps qui a fait ressortir des rôles féminins très originaux, des femmes tenaces, volontaires, pas nécessairement aimables mais qui s’accrochent et se battent. Des femmes qui laissent aussi au vestiaire les clichés de gravures de mode, qui assument leur âge, leur allure et ne cherchent jamais à minauder ou prendre des poses.

Citons ainsi Blaga’s Lessons de Stephan Komandarev, dans lequel une professeure de langue, à cheval sur le bien parler et la bonne éducation se retrouve embringuée dans une descente en apnée dans l’univers du crime bien malgré elle.

Dans Highway 65 de Maya Dreifuss, une détective mutée de façon punitive de Tel Aviv vers une localité de province va secouer la société locale en enquêtant sur une disparition qui va bousculer la bourgeoisie du coin et faire surgir des secrets pas très reluisants. Très chabrolien d’ailleurs ! Daphna est entêtée, elle se fiche bien de savoir si l’on doit courber la tête devant les puissants. Elle fait son boulot, le fait bien et se met sérieusement en danger dans l’exercice.

Pour The G de Karl R. Hearne, le grand âge, la précarité et la maladie conjuguée au manque de fric nous embarquent dans une spirale dystopique où la grand-mère mal embouchée, clope au bec et pas froid aux yeux va essayer de trouver une issue à la situation dans laquelle elle se trouve. Un mélange de Ma Dalton et Mère Courage expédiée chez Orpéa. Encore une actrice qui décoiffe et se situe bien loin des mamies à cheveux violets.

L’autre dominante de cette édition semble être un regain de violence. Pas toujours une violence abstraite, stylisée ou suggérée, elliptique, loin de là. Est-ce un effet du hasard ou la conjoncture actuelle ?

Le coréen Hopeless nous fait partager le quotidien d’un jeune homme qui se rapproche de la pègre pour gagner un peu d’argent. La noirceur du film est hypnotique. A chaque fois que l’intrigue progresse, on perd un peu plus d’illusions. Et c’est magnifique.

Très noir aussi Blood for Dust de Rod Blackhurst dans lequel, comme dans 10 Petits Nègres d’Agatha Christie ou Reservoir Dogs de Quentin Tarantino, le nombre de personnages diminue dangereusement à mesure que le film avance.

Il n’est pas question ici de détailler l’ensemble de la programmation, riche et touffue, mais il est frappant de noter combien la vengeance, la violence, la haine soufflent sur les différentes sections. Combien les personnalités sont fortes, souvent clivantes. Peut-être le côté distancié voire cynique mais avec humour a-t-il fait son temps. On pense aux Bogart et autres James Mason qui se voient remplacés par des malfrats qui ne reculent devant rien et des caméras qui osent le gros plan sur des boucheries. Mais la diversité et l’originalité de l’ensemble nous fait espérer une mouture à la hauteur pour l’édition de l’an prochain qui se tiendra du 1er au 6 avril 2025

Françoise Poul