Charlie était journaliste de mode, les belles fringues et les accessoires qui vont avec. Suite à une bévue, un mauvais article, elle se retrouve dans un placard avant la porte de sortie. Un malheur n’arrivant jamais seul, mais souvent en cohorte, on lui annonce la mort de son père, artisan boucher. Celle-ci lui rappelle cette petite fuyant l’univers de la barbaque, un mauvais souvenir de jeunesse. C’est sans doute en opposition, par pure contradiction, qu’elle a fait du luxe son métier. Le hasard est un petit farceur, surtout quand il traîne Cupidon à ses basques. La mort subite de papa et les retrouvailles avec son amour de jeunesse transforment sa route. Elle passe du sac Vuitton au chaperon de Noël. La drôle de dame sort ses couteaux et tranche dans le gras. Elle fait le grand saut d’un univers à l’autre. Elle ignore encore que les gens simples sont peut-être les plus vrais. Elle ne perdra peut-être pas au change. Il va juste falloir ne pas se laisser bouffer, désosser par les franchises et leurs viandes trafiquées.
« Manger son bifteck saignant représente une nature et une morale » Roland Barthes
Le film développe sa trame sympathique de la vraie vie face au monde des apparences. À travers la boucherie, c’est une autre façon de concevoir le monde. Même s’il s’agit de viande, Tendre et saignant se place sur le même terrain que les végétariens. C’est fini le steak frites à la sauce cholestérol. On visite la campagne, celle de la boue chantée par Michel Delpech (Le Loir et Cher), de la vie au grand air, de la sincérité et du naturel. Tendre et saignant souhaite réconcilier viandards et écolos. Fini le monde des mensonges et des m’as-tu vu, des prétentieux aux comptes en banque bien chargés. Pour faire bon poids bonne mesure, on rajoute une petite romance à l’eau de rose.
On emballe le tout dans un papier cadeau et la commande est prête. Charlie applique à la boucherie son savoir-faire dans la communication et la mode, aidée de Martial, son amoureux de jeunesse. Elle joue la carte des grands chefs, de l’excellence, le luxe dans la bidoche. On respecte les codes du genre, on s’aime, on se sépare, on s’égare, on se retrouve et on s’épouse. Christopher Thompson, fils de Danièle Thompson, la reine de la comédie chorale, petit-fils de Gérard Oury, connaît la chanson.
Le vieux routier des comédies romantiques trouvera une version boucherie à savourer sans surprise. La débutante s’extasiera de la performance de son acteur du 20 h 30. Arnaud Ducret reste fidèle à lui-même, au risque de s’enfermer dans des rôles redondants. Tendre et saignant avec ses allures de film du samedi, pourrait bien trouver son public dans le paysage actuel, sans révolutionner le genre.
Patrick Van Langhnehoven
Titre original : Tendre et saignant
Réalisation : Christopher Thompson
Scénario : Fabrice Roger-Lacan et Christopher Thompson
Musique : Arthur Simonini
Photographie : Rémy Chevrin
Son : Antoine Deflandre, Olivier Mortier et Thomas Gauder
Costumes : Emmanuelle Youchnovski
Montage : Pauline Gaillard
Production : Jean Cottin, Genevieve Lemal et Christopher Thompson
Sociétés de production : Les Films du Cap, Orange Studio et G. Films
Sociétés de distribution : UGC Distribution / Orange Studio (France)
Pays de production : France
Format : couleur — 2,35:1
Genre : comédie
Durée : 91 minutes
Dates de sortie : 19 janvier 2022
Distribution
Géraldine Pailhas : Charly Fleury
Arnaud Ducret : Martial Toussaint
Alison Wheeler : Carole Katayan
Stéphane De Groodt : Miguel Amestoy
Jean-François Stévenin : Jacques Fleury
Antoine Gouy : Yves de la Closerie
Élisa Ruschke : Julia
Anne Le Ny : Madame Keller
Antony Hickling : Sid Kharish