C’est quatre murs et une éternité de saisons à travers le ciel du velux. Jack, cinq ans, coincé entre quatre murs depuis sa naissance ne connaît que cela du monde. Son univers avec sa mère Joy, prisonnière depuis sept ans, se limite à une prison où, de temps en temps, leur bourreau Vilain Nick se pointe. Ces jours de misère il doit se calfeutrer dans le placard et faire silence. Pour Jack, il n’existe que ce monde réel et autour, rien d’autre. La télé diffuse une fausse réalité. C’est de la fiction, la réalité c’est l’enfer qu’ils vivent.
C’est ainsi qu’elle protège son fils en lui inventant un monde entre Alice au pays des merveilles, prisonnière d’un autre univers et le Comte de Monte-Cristo qui un jour reviendra assouvir sa vengeance. A l’extérieur, des extra-terrestres circulent de planète en planète. Un jour, Joy, à bout, trouve un subterfuge pour que Jack s’échappe. Récupéré par la police, il aide à la libération de sa mère et c’est un autre monde qui s’ouvre à ses yeux. Il retrouve ses grands-parents séparés et comprend très vite comment fonctionne le monde. Joy a plus de mal à retrouver la route des jours heureux qui ne reviendront peut-être jamais. Il faut de nouveau se réinventer une vie pour oublier les années perdues à penser qu’ils duraient l’éternité.
Room est un scénario d’Emma Donoghue, adapté de son roman basé sur des faits réels. Elle choisit plusieurs histoires de jeunes filles séquestrées ayant donné naissance à des enfants. Ce sont les affaires Fritzl, Jaycee Lee Dugard ou encore Natascha Kampusch. Lenny Abrahamson nous avait un peu déçus avec son prometteur Frank. Il se rattrape avec ce film taillé pour les Oscars. L’histoire est vue à travers les yeux de Jack et se situe donc loin du thriller à rebondissements. Comme Atom Egoyan avec Captives, c’est autre chose qui intéresse le réalisateur. C’est à la fois comment réinventer la vie, éloigner la souffrance entre quatre murs.
Le petit garçon raconte le monde avec ses yeux et ce qu’il en sait. Il se construit ses propres chimères, ignorant même la douleur profonde de sa mère et ce qu’elle subit. D’ailleurs, il ne comprend pas pourquoi on ne sort pas. Lenny Abrahamson multiplie les plans et les angles pour ne pas enfermer le spectateur dans cette première partie. La pièce prendra toute son horreur à la fin du récit quand, pour fermer définitivement le chapitre, Jack demandera à la revoir. Elle lui paraitra toute petite. De la même façon, nous n’ignorons pas ce que subit Joy de son kidnappeur, comme Jack, nous percevons uniquement les grincements du lit. Pour Jack dans l’idée du conte, il représente l’Ogre des contes qui dévore les petits enfants. Il ne sait pas que c’est son père.
À travers l’enfant, nous aurons l’histoire complète de cette claustration et les raisons de sa passivité. Dans un deuxième temps, c’est un autre enfermement qu’ils endurent pour échapper à la foule et leur ravisseur. Jack se rebâtit plus rapidement, découvre un chien qui n’est pas imaginaire, construit une maison (Room) en lego et joue dehors avec un copain. Au début, c’est un garçon aux cheveux longs que l’on prendrait pour une petite fille, sans doute celle de contes de Barbe bleue ou autre. Dans la fin de la deuxième partie, une fois les démons chassés, nous passons au sens de la vie retrouvé. Il se coupe les cheveux pour assumer pleinement sa renaissance.
Joy a plus de mal pour se reconstruire, croulant sous le poids de la culpabilité qu’il lui faudra des années pour oublier. Il reste toutefois un lien indestructible entre la mère et l’enfant qui ne s’éteindra jamais. Le film tient à l’alchimie parfaite des deux acteurs. Brie Larson déjà remarquée dans State Of Grace confirme avec son Oscar qu’elle est une comédienne prometteuse. Le jeune Jacob Tremblay dans un rôle difficile pour un enfant de son âge réussit une belle performance. Le film joue sur cette relation tout en finesse, comment construire une autre vie dans un endroit restreint et se reconstruire une fois libre.
Patrick Van Langhenhoven
Titre : Room
Réalisation : Lenny Abrahamson
Scénario : Emma Donoghue d'après son roman Room
Décors : Mary Kirkland
Directeur artistique : Michelle Lannon
Costumes : Lea Carlson
Photographie : Danny Cohen
Montage : Nathan Nugent
Musique : Stephen Rennicks
Production : David Gross et Ed Guiney
Sociétés de production : Element Pictures, Film4 et No Trace Camping
Sociétés de distribution : A24 Films
Pays d'origine :anada et Irlande
Langue originale : anglais
Format : couleurs — 2,35:1 — son Dolby Digital — 35 mm
Genre : Drame
Durée : 118 minutes
Budget : 6 millions de dollars
Dates de sortie :9 mars 2016
Distribution
Brie Larson (VF : Marie Tirmont) : Joy « Ma » Newsome
Jacob Tremblay : Jack Newsome
Joan Allen : Nancy Newsome
William H. Macy : Robert Newsome
Sean Bridgers (VF : Loïc Houdré) : Vieux Nick
Tom McCamus (VF : Patrick Béthune) : Leo
Amanda Brugel : officier Parker
Joe Pingue : officier Grabowski
Megan Park: Laura
Cas Anvar : Dr Mittal
Récompenses
Oscars du cinéma 2016 : Oscar de la meilleure actrice pour Brie Larson
Festival international du film de Toronto 2015 : People's Choice Award
Festival international du film de Vancouver 2015 : VIFF Award du meilleur film canadien
British Independent Film Awards 2015 : meilleur film indépendant international
Festival international du film des Hamptons 2015 : meilleur film
National Board of Review Awards 2015 :
Meilleure actrice pour Brie Larson
Meilleur espoir pour Jacob Tremblay
Golden Globes 2016 : meilleure actrice dans un film dramatique pour Brie Larson
SAG Awards 2016 : Meilleure actrice pour Brie Larson
British Academy Film Awards 2016 : Meilleure actrice pour Brie Larson