Samantha, et Céline sa copine voient leurs espoirs en prendre un coup avec la fermeture de l’usine de poulet. Elles sont prêtes à se retrousser les manches pour éviter le chemin de galère et découvrir un boulot pour s’en sortir. Sam, avec sa petite sœur différente à charge, ne doit pas trainer. Le service à l’enfance lui accorde quelques semaines pour trouver un travail et offrir, selon leurs critères, une ambiance familiale convenable à Kim. Céline accepte de fournir quelques conseils par téléphone à des messieurs dans la misère sentimentale. Sam en pince pour le jeune avocat chargé de la liquidation de l’usine.
Quand il lui propose un rencart dans un restau de luxe, c’est le branle-bas de combat pour lui donner toutes ses chances. Elle ne se doute pas un instant de la proposition qu’il va lui faire. Touchant le fond, réduite à accepter le pire, elle cède devant le gros chèque du bellâtre. Elle loue son corps pour une GPA. L’amour que l’on porte aux siens n’a pas de prix. Dylan le voisin amoureux transi toujours prompt à lui rendre service devra se décider rapidement pour lui faire sa déclaration comme le lui conseille Céline. Il ne faut pas espérer un miracle avec les institutions sociales à vos trousses, les dés sont pipés. Madame Galacher et Monsieur Buzenval s’accrochent comme deux pitbulls à leur bonne conscience pour le bien de la petite. Toute la tribu de Samantha serre les coudes pour trouver un autre moyen, afin que les deux sœurs vivent dans la paix et le bonheur.
Charlotte De Turckheim, au-delà des thématiques du travail, de la société confrontée aujourd’hui à la loi de l’argent, et des mères porteuses, s’intéresse avant tout à la différence et à la famille. Les premières servent de toile de fond pour s’interroger. Jusqu’où sommes-nous capables d’aller pour sauver ceux que nous aimons ? Elle s’entoure des nouvelles étoiles montantes de la comédie, Alice Pol, Audrey Lamy et la petite Anne Lemarchand, repérée dans Du vent dans mes mollets. Le résultat donne une comédie fraiche et sympathique dans la lignée de ses œuvres précédentes. « C’est mon film le plus personnel, car les histoires de famille, d’amitié, de désir d’enfant, c’est notre lot à tous. » C’est bien le cœur du film : dans la tourmente comment faire face et garder ce qui nous tient encore debout, la famille. Pour Samantha et Kim, c’est le dernier lien avec le passé des parents disparus et la difficulté pour la petite de s’inscrire dans une vie normale.
Plus qu’un handicap lourd, c’est une autre façon d’aborder la vie que choisit de développer la réalisatrice. Une façon de glisser un peu d’onirisme avec ces papillons, eux aussi prisonniers, qui ne demandent qu’à prendre leur envol. Le problème des mères porteuses sert surtout de prétexte pour créer une situation extrême. Nous sommes loin du développement de Melody. De la même façon, le paysage social est vite évacué pour se concentrer sur les liens entre les individus. Comment il force chacun à se révéler. C’est d’abord les liens familiaux, entre les deux sœurs, l’une et l’autre finiront par accepter l’impensable pour le bonheur de l’autre. C’est dans ce renoncement qu’elles finiront par exploser les barrières qui les retenaient encore prisonnières.
Alice Pol joue à la fois de ses charmes et du décalage des situations pour la touche comique. Audrey Lamy, une fois de plus, est la bonne copine originale, volubile et tenace. Pour elle aussi, la question se pose, jusqu’où peut-on aller pour aider les gens qu’on aime ? On remarquera en amoureux transi Bruno Sanches, Liliane dans Catherine et Liliane du Petit Journal. Le cœur du cinéma de Charlotte De Turckheim, comme ses one woman show, s’articule autour de l’exclusion et de la famille. Elle en creuse le sillon depuis Mon père, ma mère, mes frères et mes sœurs, et Mince alors, le reste ne représente que la toile de fond. Par le biais du rire, elle nous interroge sur des sujets plus pertinents et nos liens avec les autres. Qui c’est les plus forts arrive parfois à nous faire nous faire rire sans chercher à parodier les autres comédies.
La réalisatrice maintient le cap et son style personnel avec toute la bonne humeur et le rire qu’elle offre à chaque film. Dommage, le récit s’égare sur trop de pistes, la crise sociale, les mères porteuses, l’équipe de Saint-Étienne, l’homosexualité… Elles finissent par n’aboutir nulle part et gêner le cœur du récit, les relations fraternelles, amicales, et la différence, largement suffisantes.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : Qui c'est les plus forts ?
Réalisation : Charlotte De Turckheim
Scénario : Charlotte De Turckheim et Clément Koch, d'après la pièce de théâtre de ce dernier : Sunderland
Décors : Patrick Dutertre
Costumes : Juliette Chanaud
Photographie : Dominique Bouilleret
Son : François De Morant
Montage : Florent Vassault
Musique : Polérik Rouvière
Production : Philippe Carcassonne et Richard Pezet
Sociétés de production : Ciné @ et Orange Studio
Société de distribution : Wild Bunch Distribution
Pays d'origine : France
Langue originale : français
Format : couleur - 2.39 : 1
Genre : comédie dramatique
Durée : 103 minutes (1 h 43)
Distribution
Charlotte De Turckheim : Madame Galacher
Alice Pol : Samantha
Audrey Lamy : Celine
Bruno Sanches : Dylan
Anna Lemarchand : Kim
Grégory Fitoussi : Paul
Daniel Njo Lobé : Gordon
Barbara Bolotner : Valou
Julia Piaton : Pépin
Cristiana Réali : la mère
Catherine Hosmalin : Solange