Depuis longtemps, les mines de charbon de ce nord-est du Royaume-Uni se sont tues. Le chômage étend sa main sur le petit village sans que rien ne l'arrête. TJ Ballantyne tient le dernier repaire des rescapés d'un monde qui se meurt. Entre deux pintes, on refait le monde et on espère une renaissance de ce coin oublié. L'arrivée de réfugiés syriens devrait apporter un sang nouveau. Hélas, cela ne fait que creuser la frontière entre les pour et les contre, avec pour no man's land « Le vieux chêne » le pub de TJ Ballantyne. Ce dernier sympathise avec Yara, une jeune migrante passionnée de photographie. Il lui ouvre même les portes de son lieu secret orné des photos d'un temps perdu, celui de la mine. La réconciliation pourrait se faire autour d'un projet de partage commun. Les mauvaises volontés pugnaces des désabusés trouvant là de quoi concentrer leur rancœur risquent d'envenimer la situation. Il faudra faire un pas l'un vers l'autre, un grand pas vers le partage, choisir l'amour face à la haine.
Depuis Jimmy's Hall en 2014, Ken Loach annonce son dernier film. Heureusement pour nous, il trouve toujours un nouveau combat à mener. The Old Oak est un résumé de toute son œuvre, celle du partage et de la différence, sur fond social, humanitaire et historique. Le message est aussi clair que l'apparition de l'Ange Gabriel à la Sainte vierge et il existe depuis la nuit des temps : « Aimons-nous les uns les autres ». Depuis son premier film, Pas de larmes pour Joy en 1967, Ken Loach développe les mêmes thématiques de partage de nos différences, de la crise sociale, avec parfois une incursion dans l'histoire comme Le vent se lève, Palme d'or au Festival de Cannes 2006 (à l'unanimité).
Il s'attache à défendre les plus démunis face à un système libéral qui les étouffe. Ses films sont les échos de son combat personnel de tous les jours. Dans The Old Oak, il aborde pour la première fois de front le problème de l'immigration à travers des réfugiés syriens. C'est un îlot perdu, oublié du fin fond de l'Angleterre, ce nord-est déjà abordé dans Moi, Daniel Blake et Sorry We Missed You. C'est le regard de l’autochtone sur l'autre, l'étranger, bousculant les habitudes de ces habitants abandonnés par le système. Pour certains, c'est l'occasion de trouver un nouveau souffle et de partager ses différences pour grandir. Il reste toujours un clan d'irréductibles refusant que l'on bouscule leur dernier bastion. C'est la photographie, l'image immobile, qui crée le lien entre TJ Ballantyne et Yara.
Ils finiront par comprendre qu'ils ont bien plus de points communs que de différences. Nous retrouvons la solidarité, la force du groupe et une universalité du libéralisme détruisant l'humanisme. La lutte est devenue une cause internationale face à l'argent et une mondialisation écrasante. C'est une galerie de personnages tous aussi attachants les uns que les autres dans une mise en scène classique sur un sujet que certains trouveront assez simple, mais tout aussi engagé que les autres films du réalisateur. Pour ma part, je vois plutôt une certaine épuration du discours pour aller à l'essentiel et un sommaire de tous ses films. Il serait donc dommage de se priver de ce nouvel opus qui, une fois de plus, nous rappelle qu'il faut si peu pour que le monde soit meilleur ou pire.
Patrick Van Langhenhoven
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Titre original et français : The Old Oak (litt. « Le vieux chêne »)
Réalisation : Ken Loach
Scénario : Paul Laverty
Musique : George Fenton
Direction artistique : Lili Lea Abraham
Décors : Fergus Clegg
Costumes : Jo Slater
Photographie : Robbie Ryan
Montage : Jonathan Morris
Production : Rebecca O'Brien (en)
Sociétés de production : Studiocanal UK, Sixteen Films et Why Not Productions avec la BFI, BBC Film et Les Films du Fleuve.
Sociétés de distribution : Studiocanal (Royaume-Uni)2, Le Pacte (France)
Pays de production : Royaume-Uni, France, Belgique
Langue originale : anglais, arabe
Format : couleur — 35 mm
Genre : drame
Durée : 113 minutes
Dates de sortie : 26 mai 2023 (festival de Cannes)25 octobre 2023 (sortie nationale)
Distribution Dave Turner : T.J. Ballantyne
Ebla Mari : Yara
Claire Rodgerson : Laura
Trevor Fox : Charlie
Chris McGlade : Vic
Col Tait (VF : Jean-Luc Atlan) : Eddy
Jordan Louis : Garry
Chrissie Robinson : Erica
Chris Gotts : Jaffa Cake
Jen Patterson (VF : Frédérique Cantrel) : Maggie
Arthur Oxley : Archie
Joe Armstrong : Joe
Andy Dawson : Micky
Maxie Peters : Tommy
Sélection Festival de Cannes 2023 : sélection officielle, en compétition6
Festival international du film de Locarno 2023 : projection Piazza Grande