Max, Paul et Simon entretiennent leur amitié depuis 35 ans, sans un nuage, malgré leurs différences, ils partagent tout. Max tient un cabinet de radiologie. Il hésite à s’engager définitivement avec Magali. Un rien maniaque sur les bords, il aime l’ordre et que rien ne dépasse du cadre. Paul est un rhumatologue réputé avec pignon sur rue. Une petite vie rangée sans trop d’aléas, avec Karine sa femme qui passe le plus clair de son temps à dormir. Leurs deux enfants survivent dans cette ambiance où maman joue les Cendrillon et papa, trop occupé, ne fait que passer. Simon est celui qui réussit le mieux sa vie professionnelle.
Il est le patron de plusieurs salons de coiffure. Il en est tout autrement dans sa vie privée, son amour n’est pas au beau fixe. Estelle, sa compagne, semble lasse d’une vie où monsieur court la première damoiselle au look de top-model. Un soir ordinaire où nos trois compères tapent le carton loin des femmes, le temps tourne à l’orage et l’horizon s’annonce sombre et sans espoir. Ce soir ordinaire, Paul et Max attendent Simon, en retard comme toujours, avec un décalage horaire important cette fois-ci. Et pour cause, il leur annonce qu’il vient d’étrangler Estelle. Il compte bien sur leur amitié pour le couvrir, et témoigner qu’à l’heure du crime, ils étaient ensemble. Max et Paul réclament une nuit de réflexion, ne dit-on pas qu’elle porte conseil. C’est l’occasion de tester les limites de leur amitié et de prendre une décision cruciale, coupable, pas coupable !
« Que diable allait-il faire dans cette galère? » Molière (Les fourberies de Scapin).
C’est bien la question que nous nous posons en ce qui concerne le réalisateur et les acteurs. Jusqu’à maintenant, Richard Berry avait fait le bon choix depuis L’art (délicat) de la séduction en 2001, Moi César, 10 ans ½, deux comédies bien troussées, parfois même inventives. Il enchaine sur deux films noirs, La boîte noire en 2005 d’après l’œuvre de Tonino Benacquista et L’Immortel en 2010, deux œuvres que nous aimions bien. Même si les avis étaient partagés, nous trouvions que dans l’ensemble, il existait un vrai choix de mise en scène. Nous sommes donc surpris par ce dernier opus, tirant plus sur le théâtre filmé, la commande, qu’un véritable choix. Daniel Auteuil, brillant acteur par ailleurs, cabotine et en fait des tonnes avec la colère à la Gabin. Richard Berry livre un jeu aussi coincé que son personnage et Thierry Lhermitte apparaît si peu qu’il ne manque à personne.
C’est bien la confrontation de trois identités différentes masquant une réalité plus ambiguë, le cœur du récit. Comme d’habitude dans ce genre de film, le bonheur n’est pas aussi simple ni évident. Simon, derrière sa réussite, cache une faille plus importante, un mal-être qui devrait éclater et permettre de ressouder leurs liens. Max, de la même façon, dissimule une peur de l’avenir, de s’engager que cette nuit révèle au grand jour. Paul demeure aveugle à une existence routinière masquant la souffrance de sa femme, et de sa fille. Elles n’osent lui avouer leur chaos intérieur et l’envie de changer de voie pour la seconde. Cette soirée se transforme, comme dans toutes les comédies, par l’instant de la révélation, de la mise à nu de chacun. Elle passe par la colère, l’aveuglement, un soupçon de mauvaise foi et une tempête finale où chacun retrouve le sens à donner à sa vie.
Elle demande du relief, du dialogue percutant, gratter profondément sur l’étal de nos sentiments et de nos failles secrètes pour enfin renaitre tel le Phénix ! La demande de Simon devient le révélateur, le catalyseur, le point de non-retour ou au contraire un nouvel horizon de leur amitié. Jusqu’où est-on capable de mentir, de couvrir un ami ? La première séquence devrait capter notre attention, nous saisir à bras le corps pour nous entrainer dans le huis clos. Trop banale, classique, elle annonce la suite des évènements qui ne changeront pas. L’exercice de la pièce transformée en film n’est pas simple.
Le huis clos emprisonne souvent le spectateur, finissant par le lasser. C’est ce qui se produit ici. Les maigres tentatives d’aérer l’histoire par deux ou trois séquences en extérieur n’apportent pas la respiration souhaitée. Nos femmes finit par montrer ses limites. Nous attendons donc avec impatience le retour à des scénarios plus ambitieux. Nous oublierons bien vite ce faux pas que nous classerons au rayon des objets de commande, pour un projet plus personnel à venir.
Patrick Van Langhenhoven.
Titre original : Nos femmes
Réalisation : Richard Berry
Scénario et dialogue : Éric Assous, d'après sa pièce de théâtre
Directeur de la photographie : Thomas Hardmeier
Montage : Mickael Dumontier
Décors : Vincent Deleforge
Producteur : Thomas Langmann
Sociétés de production : La Petite Reine et TF1 Films Production
Distribution : Mars Distribution
Pays : France
Distribution
Daniel Auteuil : Paul
Richard Berry : Max
Thierry Lhermitte : Simon
Pauline Lefèvre
Joséphine Berry