Les Chevaliers blancs
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En Bref
L’Afrique, ses chimères, ses guerres, et son aide humanitaires, ses ONG pleines de bonnes intentions pour sauver le monde de la misère. Il faut dire que sur ce continent, la tâche semble rude et les maux ne manquent pas. Jacques Arnault est sans doute un brave type, pompier dans le civil, président de l’ONG « Move for kids ». Il ne se contente pas des mots, mais affirme ses convictions par ses actes. Nous retrouvons toute l’équipe de bénévoles débarquant au Tchad pour mettre en place un vaste projet d’éducation des orphelins. Pleins de bonne volonté, après quelques coups de feu ils se retrouvent retranchés dans un ancien fort. Il est temps de s’installer, de préparer la réception des enfants, de régler les quelques éléments pratiques qui ne manquent pas.
La première rencontre avec les chefs de tribu ne semble pas se passer forcément comme le rêvait Arnault. L’opération apparaît très vite ambiguë, un discours pour les populations locales et un autre bien caché pour un final qui interroge. Pour les chefs de village, les orphelins apprendront dans un centre local à lire et écrire jusqu'à un certain âge. L’idée est séduisante et pleine d’humanisme, apporter à ces gosses démunis un avenir meilleur. Il existe un autre dialogue tenu en secret au sein de l’équipe, le but est de ramener en France les 300 orphelins pour qu’ils soient adoptés par des familles. C’est donc une expédition proche d’un kidnapping que prépare l’ONG. Ils sont tous convaincus que c’est la bonne solution, l’adoption étant interdite au Tchad, pour donner aux enfants un avenir meilleur. Le décompte est lancé, l’horloge tourne, du mensonge ou de la vérité qui aura le dernier mot ?
Le film s’inspire de l’Arche de Zoé, au nom de l’humanisme, cette association voulait enlever des enfants orphelins pour leur donner une nouvelle famille en France. En 2007 Éric Breteau son directeur et son équipe son arrêtés, alors qu’ils embarquent une centaine d’enfants sans autorisation. Joachim Lafosse s’inspire aussi du livre sur les rapports entre l’occident et l’Afrique Nicolas Sarkozy dans l’avion ? Les zozos de la Françafrique. Jusqu'à maintenant son cinéma travaillait sur l’intime, l’ingérence. L’enfant, la famille tenaient une place importante au cœur de ses récits. Avec Les chevaliers blancs, il donne de l’espace à celui-ci, ses décors prenant le désert comme toile de fond. Le cœur de l’histoire reste dans l’intime, le sensible, le sentiment. Arnault, Vincent Lindon a quelque chose de Niels Arestrup le Docteur Pinget dans le précédent film A perdre la raison par son obsession. Peu à peu comme le dit le réalisateur, l’égo d’Arnault étouffe la cause. Le personnage est admirablement joué par un Vincent Lindon une fois de plus habité par son rôle.
Il est sûr de son bon droit. Il ne commet pas un acte répréhensible, mais une action de première nécessité, même si elle doit en passer par le mensonge. Il finit par se convaincre que les bonnes intentions prévalent sur tous les mensonges. Il emporte dans son idéalisme sa compagne, impeccable Louise Bourgoin, et quelques autres membres de l’équipe. Une partie l’abandonne en cours de route quand elle découvre les proportions du mensonge dans lequel elle s’est investie malgré elle. Deux autres personnages viennent en contrepoint, Valérie Donzelli, une journaliste qui peut apparaître comme la conscience, par son refus de prendre parti au début. Peu à peu ses questions soulèvent le voile et montrent ce qui s’y dissimule.
Elle finit, sous le charme d’un orphelin, par perdre sa place neutre. Reda Kateb en pilote baroudeur local finit par ne plus supporter l’ingérence à l’occidentale. C’est aussi un des aspects que dévoile le film dans sa relation aux chefs de tribu où l’argent semble pouvoir tout acheter et n’achète rien. De la même façon, dans son rapport aux habitants du cru, c’est la découverte du mensonge et de la manipulation qui deviennent intenable. « Move for kids » défend une certaine idéologie qu’elle ne cesse de trahir en se comportant sans tenir compte des autres. Arnault croit acheter le mensonge sa trahison auprès de Bitou l’interprète en lui laissant à disposition l’infrastructure et les bénéfices qui en découlent. Comme un père pense acheter l’amour de son fils à coup de biftons.
Nous en venons à douter de l’idée de départ et de sa bonne conscience et envisageons un aspect de trafic d’adoption. Le film ne prend pas parti, il ne dénonce pas, il interpelle sur des situations qui, au nom de l’humanitaire, se transforment en ingérence. C’est toute la question de nos rapports à l’autre qu’il questionne et aux pays en voie de développement. Comment pouvons-nous aider si nous ne comprenons pas ? Il surligne certaines situations actuelles où les Occidentaux se retrouvent démunis. Comme il nous le confiait dans l’interview à découvrir, il souhaite que le spectateur fasse une part du voyage, qu’il réfléchisse à ce qu’il vient de voir et en tire son propre avis.
Patrick Van Langhenhoven
Titre français : Les Chevaliers blancs
Réalisation : Joachim Lafosse
Scénario : Joachim Lafosse, Thomas van Zuylen et Bulle Decarpentries d'après le livre Nicolas Sarkozy dans l'avion? Les zozos de la Françafrique de François-Xavier Pinte et Geoffroy d' Ursel
Pays d'origine : Belgique
Format : Couleurs - 35 mm
Genre : drame
Durée : 112 minutes
Dates de sortie :
12 septembre 2015 : Drapeau du Canada Canada (Festival international du film de Toronto 2015)
24 septembre 2015 : Drapeau de l'Espagne Espagne (Festival international du film de Saint-Sébastien 2015)
20 janvier 2016 : Drapeau de la France France
Distribution
Vincent Lindon : Jacques Arnault
Louise Bourgoin : Laura Turine
Valérie Donzelli : Françoise Dubois
Reda Kateb : Xavier Libert
Stéphane Bissot : Marie Latour
Raphaëlle Lubansu : Nathalie Joris
Jean-Henri Compère : Roland Duchâteau
Philippe Rebbot : Luc Debroux
Yannick Renier : Chris Laurent
Tatiana Rojo : Christine Momboza
Catherine Salée : Sophie Tinlot
Luc Van Gunderbeeck : Yves Meynard
Bintou Rimtobaye : Bintou
Nahar Salah Abakar : Hassan
Ahmad Majoubi : Chef Olafi
