De la terre rouge et aride du bush australien à la terre couleur de soleil de Turquie, il n’existe peut-être que le vent parcourant la terre et un tapis volant pour oublier le malheur. Un fermier avait trois fils, l’avenir, l’horizon marqué d’espérance, la promesse d’une vie. Aujourd’hui il ne reste qu’un puits sec, une mère percluse de douleurs qui épouse la mort et la promesse de ramener les corps sans vie auprès de leur génitrice. Ils auront échappé au sable de sang du désert, au labeur du paysan pour s’échouer à Gallipoli. Ils finiront la route sur une terre inconnue, aux portes de l’orient pour défendre une cause, un sens à donner à l’avenir. Joshua, silhouette perdue, ombre fantôme voilée par le néant tiendra sa promesse.
C’est ainsi qu’il retrouve un lien avec ses enfants sur le champ de bataille où, après la guerre, les ennemis d’hier se serrent la main. Il manque l’ainé, convaincu de sa survie derviche tourneur dans la moiteur du soir entre ombre et lumière. Le père reprend la quête. Il trouve l’appui du commandant Hasan et de son aide de camp. Le boucher sanguinaire d’hier devient guide, la faucheuse rendra le dernier des fils pour qu’avec le père ils reprennent la construction du futur. C’est la fin du voyage et des rencontres transformant les certitudes, les idées reçues en nuages perdus dans le fond bleu du ciel pour dévoiler la promesse du soleil.
Pour sa première réalisation, une grande épopée à la David Lean, Docteur Jivago, La route des Indes, Lawrence d’Arabie, Russell Crowe rend hommage à l’Australie et la Nouvelle-Zélande avec la bataille de Gallipoli ou plutôt ses conséquences. Nous pouvons le voir comme un conte, un film humaniste sur la réconciliation et la promesse de retrouver le sens de sa vie. Chaque personnage semble traversé par cette idée de la promesse de vie du titre. Hasan l’ennemi veut redonner à son pays un avenir, Joshua retrouver ses fils, les ramener auprès de leur mère pour que son âme trouve la paix rédemptrice. Il en est de même de la jeune veuve tenant l’hôtel où Russell Crowe trouve un moment de paix dans ce chemin de douleur. Elle perd son mari, lui ses fils, ils devaient forcément se rencontrer.
Dans une première partie, l’acteur installe l’ambiance, montre le lien profond unissant cette famille avec une belle scène de tempête de sable. Le cœur du récit est bien cette promesse à venir, la bataille est donc évacuée assez rapidement, de façon classique, comme la majorité du film. C’est un film d’hommes. Les deux portraits de femmes, la mère et la jeune veuve, sont esquissés avec juste ce qu’il faut pour construire un semblant de romance. C’est la quête de fantômes pour que le dernier vivant puisse rebâtir sa vie, combler les blessures du passé et tenir la promesse à une mère, son amour. La famille est bien le lien central, celle que l’on perd et reconstruit, celle que l’on défend. C’est un thème biblique, centre du cinéma américain qui n’en finit pas de le hanter.
Le réalisateur n’égare pas le spectateur. Il l’entraine dans ses pas, lui fait faire un peu de tourisme comme la visite de la grande mosquée. L’autre thématique représente la réconciliation, la compréhension de l’autre. Dans sa quête, Joshua apprend à regarder d’une autre façon son guide, le commandant sanguinaire devient l’ami de demain. Le film offre donc un beau voyage, un peu d’humanisme et la promesse d’une vie nouvelle où la haine n’existerait pas. Il est dommage que la promesse d’une vie trop sage ne s’envole pas comme avec ses mentors David Lean ou Peter Weir avec son Gallipoli.
Russel Crowe ne creuse pas le sillon de la spiritualité évoqué en deux images, son côté chamane et les derviches tourneurs que je vous laisse découvrir. De la même façon, les oppositions entre les ennemis d’hier sont vite aplanies, comme la romance. Il manque de lyrisme, d’envolées tragiques ou romantiques, de relief. Il n’arrive pas à nous prendre au cœur. Pour une première réalisation, elle tient malgré tout la route, ne s’égare pas en cours de route, reste classique en évitant les défauts du genre. Le travail de Russel Crowe se peaufinera avec le temps sans aucun doute.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : The Water Diviner
Titre français : La Promesse d'une vie
Réalisation : Russell Crowe
Scénario : Andrew Anastasios et Andrew Knight
Direction artistique : Marita Mussett
Décors : Chris Kennedy
Costumes : Tess Schofield
Montage : Matt Villa
Musique : David Hirschfelder
Photographie : Andrew Lesnie
Production : Troy Lum, Andrew Mason et Keith Rodger
Producteurs délégués : John Collee, James Packer et Brett Ratner
Sociétés de production : Fear of God Films et Hopscotch Features
Sociétés de distribution : Australie
Pays d’origine : États-Unis, Australie
Langue originale : anglais
Genre : Drame historique
Distribution
Russell Crowe : Joshua Connor
Olga Kurylenko : Ayshe
Jai Courtney : Le lieutenant-colonel Cyril Hughes
Jacqueline McKenzie : Eliza
Yılmaz Erdoğan : Le commandant Hasan
Damon Herriman : le père McIntyre
Brislee Adams : le médecin
Cem Yılmaz : Le sergent Jemal
Deniz Akdeniz : l'imam
Daniel Wyllie : le capitaine Charles Brindley