C’est l’histoire d’Adélaïde Château-Têtard, surnommée la reine mère, et de son fils Paul. Ce dernier n’est pas le fils prodigue tant attendu. Il passe son temps à jouer sur son portable et se laisse porter par la vie. La vie prend d’autres couleurs quand il s’éprend et épouse, malgré les réticences de la reine mère, Ava, une jolie guichetière. Ava apporte un vent de fraicheur dans cette famille guindée par des années de traditions. Adélaïde n’accepte pas le choix de son fils, imaginez donc, une roturière ! La guerre est déclarée entre les deux femmes. C’est la loi de la jungle ! La reine mère espère un petit-fils pour prolonger la lignée des Château-Têtard. Ava espère un peu plus d’indépendance et moins de convenances. Elle profite de s’échapper pour découvrir le monde extérieur plus chatoyant. Adélaïde pense que son fils porte une belle paire de cornes et engage un détective. Ce dernier n’a rien d’un Philip Marlowe, il serait plus proche d’un Jack Palmer. Adélaïde ignore qu’elle vient de mettre le loup dans la bergerie et que toute cette affaire finira en quenouille !
Antonin Peretjatko construit un univers particulier et loufoque entre la bande dessinée, une pincée de surréalisme, et beaucoup de burlesque. Après le remarquable La fille du 14 juillet et le débridé La loi de la jungle, il plonge avec talent dans l’univers des gens à particule. Il nous entraine d’abord dans une galerie grotesque de personnages décalés. Elle doit beaucoup au talent de ses comédiens, de Josiane Balasko à Philippe Katerine en passant par Anaïs Demoustier, Sergi López, Philippe Duquesne et le surprenant William Lebghil. Antonin Peretjatko en profite pour nous parler d’amour, de lutte des classes, de musique, de la vie en général. C’est un mélange de bande dessinée avec ses situations loufoques, comme une jeune femme nue dans un étui de contrebasse et de dialogues savoureux souvent surréalistes avec des situations proches du burlesque, entre Chaplin et Tatie.
Cet univers particulier, qui lui est propre, peut en déconcerter certains et en enchanter d’autres. Antonin Peretjatko s’appuie sur une nouvelle de Noëlle Renaude, Il faut un héritier croisé avec Tchékhov, Le roman d’une contrebasse pour construire son récit. On pourra chercher les nombreuses références en seconde lecture aux Bronzés, entre autres, avec ce slogan repris par Josiane Balasko « ça va trop vite ». Dans cette balade, le rire l’emporte sur fond de mélange des classes, de vieux garçon, de vieille femme autoritaire, d’une jeune femme en quête d’une vie meilleure, de détective amoureux, et tout un tas de protagonistes désopilants. S’engage entre les deux femmes une lutte de pouvoir, de domination, d’argent, et peut-être de jalousie.
Les dialogues sont savoureux et pertinents, tressant un collier de dérision sur le monde d’hier, miroir de celui d’aujourd’hui. Derrière les paravents et les lambris de haute société, c’est bien de notre époque que parle La Pièce rapportée. Les costumes sont comme un autre personnage, du nu d’une situation digne du burlesque noir et blanc, des débuts du cinéma. On les enlève pour se transformer comme Ava, pour marquer son lien social comme Adélaïde et Paul. Ils racontent une autre facette des individus en complément du récit. La Pièce rapportée est un petit bijou, loin des sentiers battus qui nous emporte au pays du rire et nous pousse à réfléchir sur notre époque.
Patrick Van Langhenhoven
Bonus:
Le film commenté par A.Peretjatko
- Scènes coupées
- Entretien avec les comédiens
le court métrage Panique au Sénat en 2D
le court métrage Mandico et Topsychopor
Titre français : La Pièce rapportée
Réalisation et scénario : Antonin Peretjatko, d'après l'œuvre de Noëlle Renaude
Photographie : Simon Roca
Montage : Antonin Peretjatko
Production : Thomas Verhaeghe et Mathieu Verhaeghe
Société de production : Atelier de Production et Orange studio
Musique : Mathieu Lamboley
Société de distribution :
Pays d'origine : France
Langue originale : français
Genre : drame, comédie
Durée : 86 minutes
Dates de sortie : 29 août 2020 (Festival du film francophone d'Angoulême) 4 décembre 2021 (en salles)
Dates de sortie vidéo: 5 avril 2022
Distribution
Anaïs Demoustier : Ava
Philippe Katerine : Paul
Josiane Balasko : Adélaïde Château-Têtard
William Lebghil : Jérôme
Sergi López : Raoul
Philippe Duquesne : Dalac
Olivier Broche : Maître Geoffroy Crépin
Alexandra Morales : Adélaïde Château-Têtard (jeune)