Leur dernier concert ne leur rapporte pas gros, la petite bande est prête à lyncher le petit malin qui leur trouve ces plans foireux. Heureusement il vient de dégotter un super coup mieux rémunéré dans un bled perdu près de Portland. Nos quatre musiciens punks arrivent dans un endroit paumé de l’Amérique, au fin fond d’une forêt des contes pour faire peur aux enfants. Ils oublient que balancer des paroles anti nazis à une bande de skinheads furax, ça mène forcément au bord du gouffre.
Ils doublent la mise au casino des emmerdes en tombant sur un cadavre planqué dans le placard. Ils se retrouvent coincés dans une petite pièce au cœur de la forêt des contes. Dehors, la meute de démons, bien humaine, hurle. L’affrontement entre nazillons en colère et pauvres musiciens tourne à Assaut de Carpenter. Tout ressemble à un conte, sauf que je ne suis pas sûr qu’il s’achève par « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants ». Une autre fin plus réaliste s’impose, hémoglobine et pierres tombales pour que dalle ! Les dés sont jetés, la marmite des sorcières bouillonne. Il leur reste à tirer la carte de la chance et de la transformation en loup-garou ou autre créature furax laissant une piste de sang dans son évasion.
Jeremy Saulnier se fait remarquer pour son excellent Blue Ruin, l’histoire de Dwight, un vagabond réclamant la loi du talion, œil pour œil. Il détournait déjà les codes du genre en nous surprenant par un ton nouveau et le soin apporté aux personnages. Loin de ressembler à toutes ces caricatures de cinéma formaté pour ne pas effrayer le public du 20h30, entre thriller et film d’épouvante, il nous interrogeait sur la loi du Talion et la vengeance. Jeremy Saulnier appartient à ces jeunes réalisateurs prometteurs, comme Jeff Nichols. Enfantés par le cinéma indépendant, ils se nourrissent assez souvent au cinéma de genre, bouffeurs de pellicule en tout style.
Saulnier puise son inspiration dans des maitres à penser comme Carpenter, Sam Peckinpah, William Friedkin, et bien d’autres. La référence à Assaut est flagrante, un groupe piégé dans un lieu clos avec une meute de zonards à ses trousses en extérieur. Le récit file comme une balle que l’on ne peut éviter mais juste la prendre en pleine figure. Film de survie d’un petit groupe retranché échappant à la fureur d’extrémistes adorateurs du petit Adolph, il trouve très vite ses limites. Il se montre moins surprenant qu’avec son premier opus et se voit plus comme un exercice de style de cinéma de genre. En fouillant un peu, il possède un ou deux atouts.
C’est son discours et son regard sur le soldat de métier et le simple quidam qui se révèle en sauvant sa vie. C’est le novice et sa fougue imprévisible face au guerrier embourbé dans sa technique. Nous retrouvons la notion du vieux maitre en quête de l’esprit du débutant. Pour le reste, il ébauche deux trois réflexions sur les groupuscules extrémistes mais ne creuse pas le sillon. De la même façon, il n’exploite pas son histoire d’amour dans cette ambiance de secte et de ténèbres fascistes. Espérons que le prochain film du prometteur Jeremy Saulnier quittera les sentiers battus pour interroger de nouveau la violence de notre société en la bousculant dans ses retranchements.
Patrick Van Langhenhoven
Titre original : Green Room
Réalisation : Jeremy Saulnier
Scénario : Jeremy Saulnier
Direction artistique : Benjamin Hayden
Costumes : Amanda Needham
Photographie : Sean Porter
Montage : Julia Bloch
Musique : Brooke Blair et Will Blair
Production : Anish Savjani, Neil Kopp et Victor Moyers
Sociétés de production : Broad Green Pictures et Film Science
Société de distribution : A24 Films
Pays d’origine : États-Unis
Langue originale : anglais
Format : couleur - 2.35:1 - Dolby numérique - 35 mm
Genre : Thriller, horreur, policier
Durée : 94 minutes
Dates de sortie : (Festival de Cannes) ; 27 avril 20161 -12 ans
Distribution
Anton Yelchin : Pat
Imogen Poots : Amber
Patrick Stewart : Darcy
Alia Shawkat : Sam
Callum Turner : Tiger
Joe Cole : Reece
Macon Blair : Gabe
Mark Webber : Daniel
Taylor Tunes : Emily
Brent Werzner : Werm
Kai Lennox : Clark
Eric Edelstein : Big Justin
Samuel Summer : Jonathan
David W. Thompson : Tad