À l’aube de la Révolution, le cuisinier du Duc de Chamfort, Pierre Manceron, commet une faute de goût. Il ose proposer à ses hôtes des mignardises, bouchées à la pomme de terre et à la truffe. « Que nenni, nous ne sommes pas des cochons ! » s’écrie un homme d’Église. Devant le refus de s’excuser, Manceron quitte Sa Seigneurie pour s’exiler au fin fond de la campagne. L’homme n’a plus d’appétence, il délaisse la cuisine pour se noyer dans la déprime. Une jeune femme mystérieuse, Louise, souhaite devenir son apprentie. Elle redonne l’envie de la bonne cuisine à notre homme. Il se lance même dans des rêves d’avenir, en inventant un lieu de bouche. C’est le premier restaurant. Il accueillera les gens de toutes classes, voyageurs et autres. C’est sans compter avec le Duc de Chamfort et un secret que cache Louise. Le rêve pourrait bien devenir cauchemar, mais nous sommes à la veille de la Révolution et tout est possible.
Éric Besnard a Le goût des merveilles et sans aucun doute, celui de la bonne chère. Sa caméra prend plaisir à filmer les gestes des arts de la bouche. Cette fiction nous raconte la naissance imaginaire du restaurant. C’est avant tout une belle galerie de personnages dans un ballet magique, entre la farine et les paysages aux couleurs du soleil. Tout est un hymne à la bonne cuisine et au savoir manger pour mieux saisir l’âme des personnages. Une petite histoire de vengeance vient mettre son grain de sel sans troubler les plats. C’est un regard sur une époque qui connaitra bientôt des troubles profonds. Dans la première partie, il croque avec délice ces précieux ridicules dignes de Molière.
C’est un monde qui n’est plus en adéquation avec le peuple et son époque. Il suffit juste d’un repas et de la façon de recevoir les plats et leur commentaire pour saisir la fracture. Dans la seconde partie, c’est le monde de la terre, des produits du terroir et des pauvres gens. La dernière partie dévoile la naissance de ce lieu de bouche nommé restaurant, loin des fast-foods indignes des agapes disait mon ami Léo Malet. C’est avec délicatesse, sous le poids de la lumière et des comédiens justes, qu’Éric Besnard filme cet hommage à la bonne chère. Pour la petite histoire, dès l’Antiquité on comptait des « fast-foods », au Moyen Age, l’auberge nourrit le voyageur.
C’est un certain Boulanger en 1765, vendant des bouillons de poule, appelés restaurants, qui serait à l’origine du nom. Il propose un service à table et un choix de plats qui ne plaira pas aux traiteurs. Ils porteront plainte. Sous la Révolution, avec la fuite de la noblesse, de nombreux cuisiniers se retrouvent sans travail. Ils créeront les premiers restaurants à la cuisine sophistiquée. On n’en compte pas loin d’une centaine à la fin du XVIIIe siècle. C’est un beau voyage dans l’univers de la bonne table, du choix des produits, du bien manger qui vous attend. Manceron, personnage fictif, a peut-être existé, allez savoir !
Patrick Van Langhenhoven
Fiche technique
Titre original : Délicieux
Réalisation : Éric Besnard
Scénario : Éric Besnard et Nicolas Boukhrief
Directeur de la photographie : Jean-Marie Dreujou
Montage : Yann Dedet
Décors : Bertrand Seitz
Costumes : Madeline Fontaine
Musique : Christophe Julien
Producteurs : Christophe Rossignon et Philip Boëffard
Société de production : Nord-Ouest Films
Société de distribution nationale : SND
Pays d'origine : France / Belgique
Langue originale : français
Format : couleur
Genre : comédie historique
Durée : 110 minutes
Date de sortie : 8 septembre 2021
Distribution
Grégory Gadebois : Pierre Manceron
Isabelle Carré : Louise
Benjamin Lavernhe : duc de Chamfort
Guillaume de Tonquédec : Hyacinthe
Lorenzo Lefèbvre : Benjamin Manceron
Christian Bouillette : Jacob
Marie-Julie Baup : marquise de Saint-Genet
Jérémy Lopez : marquis de Fourvière
Antoine Gouy : marquis du Croisic
Manon Combes : Francine
Laurent Bateau : Dumortier
Gilles Privat : évêque
Christophe Rossignon : laquais aux chandelles