Après La Nuée Just Philippot confirme sa capacité à transformer le genre en une tragédie sombre et ténébreuse, mélangeant film social et catastrophe. Avant Le règne animal, autre film, il marque une mutation du cinéma français avec une jeune génération qui n'a pas froid aux yeux. Elle bouscule les codes du genre pour réinventer une narration et une mise en scène inspirée, bluffante. Elle sort d'univers différents et n'a pas fini de nous surprendre. La pluie acide semble un écho, un reflet dans le miroir de la vie, au drame social que vivent Michal, Élise et leur fille Selma. Cette révolte intérieure trouve un écho à la catastrophe écologique, comme dans La Nuée. L'histoire nous raconte le drame d'une famille qui s'est perdue. Elle finit par se retrouver dans cette course contre le temps et la mort.

De la pluie acide nous ne saurons rien et c'est tellement mieux. L'important est ce lien entre les évènements et l'écho qui résonne avec les vivants, comme si tout était lié. Le film démarre sur un conflit social et un personnage rongé par la colère qui finit par ne plus se maitriser. Elle lui coûte le petit bonheur qu'il avait construit avec sa famille et qui le tenait debout. Guillaume Canet nous offre une nouvelle palette de son talent dans ce personnage à terre qui devra tout faire pour se relever. Il n'est pas question de super-héros mais bien d'humains avec leurs petites faiblesses peu recommandables et leur capacité à se dépasser. Michal devra lutter contre ses démons intérieurs, son égoïsme, pour transcender la catastrophe.


Selma, excellente Patience Munchenbach, est un peu perdue, habitée sans doute par la même colère que son père qui sommeille en son cœur. Elle est l'innocence prise dans cette tempête qui devra, elle aussi, changer pour embrasser demain.  Laëtitia Dosch est remarquable comme toujours, beau personnage de femme comme Virginie Suliane Brahim dans La Nuée. On remarquera que la menace vient du ciel dans les deux films ainsi que la présence de femmes fortes et d'enfants portant les mêmes thématiques. C'est la succession d'épreuves jalonnant la route qui est importante. Chaque pas devient un passage, une porte à ouvrir sur soi-même. Un labyrinthe où le fil d'Ariane est notre capacité à faire le bien. La mise en scène joue de la lumière et des couleurs, entre eau et forêt, pour un voyage au cœur d'une tragédie familiale plus intime.
   

Patrick Van Langhenhoven

Bonus:

Making of (12’51”)
Entretiens avec l’équipe du film (24’31”)

  Titre original : Acide
    Réalisation : Just Philippot
    Scénario : Yacine Badday et Just Philippot
    Musique : Robin Coudert
    Direction artistique : Arnaud Bouniort et Jennifer Chabaudie
    Décors : Gwendal Bescond
    Costumes : Sabrina Riccardi
    Photographie : Pierre Dejon
    Son : Pierre Mertens, Roland Voglaire et Xavier Thieulin1
    Montage : Pierre Deschamps
    Production : Yves Darondeau, Emmanuel Priou, Clément Renouvin, Jérôme Seydoux et Ardavan Safaee
    Sociétés de production : Bonne Pioche Cinéma et Pathé Films ; Caneo Films et France 3 cinéma (coproductions françaises) ; Umedia (coproduction belge)
    Société de distribution : Pathé Distribution
    Budget : 11,7 millions d'euros
    Pays de production : France,  Belgique
    Langue originale : français
    Format : couleur — Dolby Digital
    Genre : drame, fantastique, catastrophe
    Durée : 99 minutes1
    Dates de sortie : France - 21 mai 2023 (festival de Cannes) ; 20 septembre 2023
    Classification : tous publics, avec avertissement lors de sa sortie en salles

Distribution

    Guillaume Canet : Michal
    Laetitia Dosch : Élise
    Patience Munchenbach : Selma
    Marie Jung : Deborah

    Martin Verset : William