Cinq amis depuis plus de trente ans, ayant renoncé depuis longtemps à leurs rêves d’adolescents, découvrent un beau jour que le plus assagi de la bande plaque tout pour faire son tour du monde en bateau. En comprenant ce que cache cette décision soudaine, cela réveille leurs plus vieux rêves... Où sont passés leurs 20 ans... Ceux de l'époque où ils voulaient tout casser.
Décidément, le cinéma français semble n’avoir en stock qu’une seule recette qui marche ces derniers temps. Et il n’a aucun scrupule à la resservir à tous les repas. Des Petits mouchoirs au Cœur Des Hommes (et ses suites) en passant par Le Prénom, Nos plus belles vacances, Amitiés Sincères ou encore Barbecue, le film de potes n’a pas fini de reluire. Le petit dernier signé Philippe Guillard (Le Fils à Jo), On voulait tout casser, ne bouscule pas franchement le tableau : bande de potes à la vie à la mort, maisons de campagne (Normandie ou Bretagne), histoires de cœur variées, paternité… Mais Guillard va tout de même insister sur le côté dramatique de la comédie avec la présence de la maladie de Kiki, catalyseur de la prise de conscience. Ronronnant, inégal mais émouvant.
L’amitié masculine n’a jamais autant fait tourner la bobine. Le cinéma français en fait apparemment son mantra : jouer les nostalgiques et distiller bons sentiments, sincères amitiés, grandes retrouvailles et joie de vivre à des spectateurs moroses. Et à la longue liste citée ci-contre vient s’ajouter On voulait tout casser, petit dernier de l’ancien rugbyman Philippe Guillard. Après quelques scénarios (Turf, Disco, Camping, 3 Zéros…) et une réalisation (Le Fils à Jo), il signe son premier projet en tant qu’auteur, étiquette si chère au cinéma français ; un premier exercice qui a manifestement besoin de quelques ajustements. A travers un chœur composé de cinq hommes, Pancho, Bilou, Gérôme, Tony et Kiki, le cinéaste croise les portraits, tisse les liens, fixe un contexte mais navigue constamment en terrain connu. Confrontée à cette amitié riche de 30 ans, il y a la maladie de Kiki qu’on découvre en même temps que lui au début du film. Une maladie qu’il va décider de ne pas partager avec ses copains puisqu’il préfère prendre le large en solitaire, l’air de rien.
Dans cette bande de potes aux mécanismes bien huilés, Kiki sort d’office du décor, préférant se ressourcer seul dans sa maison en Bretagne, affichant un air triste et résigné et prévoyant ses projets dans son coin. A l’image de son personnage, Kad Merad semble à des années lumière du reste du casting, simplement en deçà du niveau global. Lui qu’on avait adoré dans un rôle dramatique dans Je vais bien, ne t’en fais pas (bon ok ça date..) ne trouve jamais le ton juste pour incarner Kiki. A grand renfort de tronches tristes et de voix trainante, il peine à rendre Kiki sympathique, même dans la deuxième partie quand il refait les 400 coups avec ses potes. En face, Charles Berling, fidèle à lui-même, joue sa partition avec malice, Benoît Magimel, séducteur et rêveur, reste dans les rails, Vincent Moscato en fait toujours un poil trop dans les gags et les mimiques mais on lui pardonne bien vite et mention spéciale à Jean-François Cayrey en Pancho lourdingue mais terriblement attachant et toujours juste. Bref, ils sont tous biens gentils avec leurs défauts charmants et leur amitié inébranlable même face à la maladie. Mais au-delà de la complicité du casting et de quelques gags bien emmenés, on peine à trouver un réel intérêt à la besogne. Guillard fait pas mal d’erreurs techniques notamment dans le montage et le découpage ainsi que dans l’usage d’une musique par moment bien trop insistante. Ensuite, il laisse ses acteurs en roue libre dans un scénario et des sentiments qu’ils ne savent visiblement pas gérer.
A l’arrivée, Guillard signe un film attachant et sincère mais brouillon techniquement et assez creux. Ses maigres réflexions sur le temps qui passe et sur le besoin de vivre sa vie à fond n’offrent pas assez de consistance et de substance à ses comédiens (malgré leur charme évident) pour trouver la justesse et le charme des comédies viriles des années 70. Ils voulaient tout casser… mais ça n’a fait que trembler légèrement.
Eve Brousse
bonus
"Têtes de tous" : making of en 2 parties (33')
Autour des comédiens (16')
Fiche technique
Titre original : On voulait tout casser
Réalisation : Philippe Guillard
Scénario : Philippe Guillard
Directeur de la photographie : Ludovic Colbeau-Justin
Son : Antoine Deflandre
Décors : Jérémy Streliski
Producteurs : Cyril Colbeau-Justin, Jean-Baptiste Dupont et Sidonie Dumas
Sociétés de production : Gaumont, LGM productions et TF1 Films Production
Distributeur : Gaumont Distribution
Pays d'origine : France
Genre : comédie
Distribution
Kad Merad : Kiki
Charles Berling : Bilou
Benoît Magimel : Jérôme
Vincent Moscato : Tony
Jean-François Cayrey : Pancho
Anne Charrier
Emma Colberti
Abbes Zahmani