Le premier film de Sofia Coppola est sorti il y a déjà 23 ans et pourtant, le souvenir de cette œuvre unique reste toujours aussi fort. Tiré de faits réels et du roman de Jeffrey Eugenides, la jeune réalisatrice fait de cette histoire sordide de suicide collectif un objet poétique, un rêve éveillé, sans pour autant magnifier le geste commis. Elle ne répond pas aux interrogations des proches de ces cinq sœurs mais offre sa vision des affres de l'adolescence dans le cadre d'un milieu strict. Les parents sont interprétés par Kathleen Turner, monstre de froideur et par un étonnant James Woods, faible comme il ne l'a jamais été ailleurs. Dès sa première mise en scène, Sophia Coppola affirme un ton particulier et un style s'inscrivant à la fois dans les pas de son père comme dans Peggy Sue s'est mariée, tout en s'en émancipant. Nous retrouvons les couleurs et une sorte d'intemporalité qui sont la marque de Francis Ford Coppola. Sophia ajoute en plus sa propre poésie, une symbolique profonde, un onirisme de conte de fées et l'adolescence parcourant toute son œuvre.
Virgin Suicides est très vite devenu un film culte avec les thématiques qu'il creuse avec justesse et profondeur. Qu'est-ce que l'adolescence ? Un mystère mêlant l'insouciance, l'innocence de l'enfance et déjà les prémices de l'âge adulte. C'est la fin d'un monde qui s'éloigne, les sentiments deviennent des souvenirs, déjà on ouvre la porte à l'adulte que nous serons demain. C'est le moment des choix, des rêves que l'on voit s'effacer comme des fantômes. Les filles se parent des formes des femmes qu'elles deviendront avant que le temps ne les flétrisse. Elles savaient tout de nous dirons l'un des garçons. Le film est vu par les garçons de cette banlieue bourgeoise aisée. Cette frontière de la grande ville tentaculaire où rien ne semble se passer. Pourtant, derrière les portes closes s'envolent des rêves, se joue la musique de l'espérance, se nouent des drames, ici comme ailleurs.
Les garçons sont à la fois triviaux, en quête des premiers sens à apaiser. Ils imaginent des princesses prisonnières dans leur tour, à délivrer pour un baiser et peut-être plus. La mort se chargera de réussir là où ils ont échoué. « On a tant parlé de ces filles, mais nous n'avons jamais trouvé les bonnes réponses. Seul compte le fait que nous les avons aimées et qu'elles n'ont pas entendu notre appel. Qu'elles ne l'entendent toujours pas, là où elles se sont retirées, pour être seules à jamais. Là où les pièces manquantes manqueront à jamais, qu'importe même qu'elles aient été des filles. » C'est bien le cœur, la fragilité de l'adolescence que saisit avec talent Sophia Coppola.
Patrick Van Langhenhoven
Titre français : Virgin Suicides
Titre québécois : Cri ultime
Titre original : The Virgin Suicides
Réalisation : Sofia Coppola
Scénario : Sofia Coppola d'après le roman de Jeffrey Eugenides, The Virgin Suicides
Musique originale : Richard Beggs, Air
Photographie : Edward Lachman
Montage : James Lyons et Melissa Kent
Production : Francis Ford Coppola, Julie Costanzo, Dan Halsted et Chris Hanley
Coproduction : Gary Marcus et Fred Roos
Production exécutive : Willi Baer et Fred Fuchs
Pays d'origine : Drapeau des États-Unis États-Unis
Langue originale : anglais
Budget : 6 100 000 $
Format : sphérique, 35 mm, 1,85:1 (couleurs, son Dolby numérique)
Genre : drame
Durée : 97 minutes
Date de sortie : 27 septembre 2000
date de sortie Vidéo : 12 juillet 2023 version remasterisée
Distribution James Woods (VF : Guy Chapellier ; VQ : Hubert Gagnon) : Ronald Lisbon, le père des filles Lisbon
Kathleen Turner (VF : Anne Jolivet ; VQ : Anne Caron) : Sara Lisbon, la mère des filles Lisbon
Kirsten Dunst (VF : Laura Préjean ; VQ : Aline Pinsonneault) : Lux Lisbon
A.J. Cook (VF : Laura Blanc ; VQ : Viviane Pacal) : Mary Lisbon
Josh Hartnett (VF : Adrien Antoine ; VQ : Martin Watier) : Trip Fontaine
Leslie Hayman (VF : Dorothée Pousséo) : Therese Lisbon
Michael Paré (VF : Éric Herson-Macarel ; VQ : Daniel Picard) : Trip Fontaine adulte
Scott Glenn (VQ : Yvan Benoit) : le père Moody
Danny DeVito (VF : Patrick Raynal ; VQ : Luis de Cespedes) : Dr Horniker
Hanna R. Hall (VQ : Kim Jalabert) : Cecilia Lisbon
Chelse Swain (VF : Marie-Eugénie Maréchal) : Bonnie Lisbon
Jonathan Tucker (VF : David Lesser) : Tim Weiner
Anthony DeSimone : Chase
Giovanni Ribisi : Narrateur
Robert Schwartzman (VF : Christophe Lemoine et VQ : Sébastien Reding) : Paul Baldino
Hayden Christensen (VQ : Joël Legendre) : Jake Hill Conley
Bande originale
La bande originale est signée Air, un groupe de musique électronique français.
Autres musiques dans le film
On the Horizon - Sloan
Can't Face Up (crédité How Many Times) - Sloan
The Air That I Breathe - The Hollies
Magic Man - Heart
Crazy on You - Heart
Strange Magic - Electric Light Orchestra
Come Sail Away - Styx
Alone Again (Naturally) - Gilbert O'Sullivan
So Far Away - Carole King
The Lines You Amend (crédité End It Peacefully) - Sloan
A Dream Goes on Forever - Todd Rundgren
Ce matin-là - Air
How Can You Mend a Broken Heart ? - Al Green
Everything You've Done Wrong - Sloan
The Good in Everyone - Sloan
I'm Not in Love - 10cc
Hello, It's Me - Todd Rundgren
Run to Me - Bee Gees