Turbo est un escargot qui n’a qu’un seul rêve en tête : être incroyablement rapide ! Son obsession pour la vitesse l’a rendu quelque peu impopulaire chez les siens, où lenteur et prudence sont de rigueur. Mais il est hors de question pour lui de s’y conformer. C’est alors que se produit un étrange accident qui lui donne soudainement le pouvoir de foncer à toute vitesse. Il s’embarque alors dans une aventure extraordinaire pour accomplir son invraisemblable destinée : courir contre le plus grand champion de course automobile, Guy La Gagne. Avec l’aide d’une équipe d’escargots aussi rusés que stylés, l’ultime outsider Turbo mettra tout son cœur – et sa coquille – à prouver qu’aucun rêve n’est trop grand, aucun rêveur n’est trop petit.
Énième variation du gigantesque succès Cars (majoritairement grâce aux produits dérivés) après Cars 2 et Planes la semaine dernière, Turbo est cette fois produit par Dreamworks. Et c'est, sans surprise, dans la lignée des produits insipides produits par la boîte de Shrek et Madagascar : des animaux, de l'humour bas-de-plafond et une direction artistique aux énormes fautes de goût.
Dreamworks animation a su produire ces derniers temps des films à la hauteur des fleurons du genre du film d'animation (si l'on peut toutefois appeler cela un genre, les limites de l'animation devenant de plus en plus floues avec des films comme Gravity) pendant que le leader Pixar prend une direction de plus en plus inquiétante. Turbo, de David Soren, rappelle que la boite de Spielberg, Katzenberg et Geffen n'a pas perdu sa mauvaise habitude de livrer des bidons de lessive aux gamins.
À la disparition du président directeur de Disney, Frank Wells en 1994, Jeffrey Katzenberg, ponte de la filiale animation, était tout assuré de terminer à la tête de la compagnie aux grandes oreilles après le renouveau des années 90. Malheureusement, le destin en décida autrement et Katzenberg s’associa au légendaire Steven Spielberg pour s'occuper de la Dreamworks animation, non sans arriver avec un contrat très juteux : quelques millions de dollars et le droit de reprendre tous les projets développés chez Disney.
Ce n'est ainsi pas un hasard si les premières productions Dreamworks sont des ersatz du concurrent Disney - Pixar : Fourmiz vs 1001 pattes, Shrek vs Monstres et compagnie, Souris city vs Ratatouille, etc.
On croyait pourtant, avec les projets ambitieux comme la surprise Dragons ou Les Cinq Légendes (développé avec Guillermo Del Toro) que le deuxième studio d'animation du monde était parti pour changer la donne.
Turbo prouve que non avec cette énième resucée de Cars, après les déjà mauvais Cars 2 (par Pixar) et Planes la semaine dernière (par Disney).
Tous les tics agaçants popularisés par Shrek ou Madagascar se retrouvent ici : une direction artistique hideuse (malgré une animation de grande qualité), de l'humour lourdingue, des références inutiles à la narration et des animaux qui font des grimaces.
La particularité de Turbo est qu'ici le délire animalier habituel de Dreamworks est poussé plus loin que jamais, où escargots et humains se côtoient sans la moindre cohérence, jusqu'à cette séquence hallucinante où Turbo, le héros du film, est soutenu par son concurrent humain La Gagne pour un défi sur un circuit de Formule 1.
Si confronter des animaux aux humains n'est pas rédhibitoire, il faut savoir faire preuve de finesse pour ne pas briser la suspension d'incrédulité du spectateur. Soit les règles du jeu sont claires dès le début en énonçant une interactivité entre humains et animaux, soit un groupe côtoie l'autre à son insu. Ici, la barrière des espèces est complètement brisée au premier tiers du film sans le moindre souci de vraisemblance et n'énoncera jamais clairement ce qui lie les escargots et les humains, comme si les uns et les autres se foutaient royalement de découvrir l'existence d'une communauté qu'ils ignoraient.
Et ce n'est pas le discours social pachydermique sur les laissés pour compte ou le parcours initiatique traité par-dessus la jambe qui sauveront le film, Turbo ne devenant ce qu'il est que par une astuce scénaristique sans queue ni tête.
Il y a certes quelques séquences de course qui valent le coup d'œil, mais mieux vaut montrer à vos gosses le déjà classique Speed Racer des Wachowski, autrement plus intelligent et palpitant.
Reda B
Pour Patrick Van Langhenhoven
N’oublions pas que Jeffrey Katzenberg sera un des premiers à proposer avec Prince d’Égypte une animation en direction des adultes, voire à plusieurs niveaux de lecture. De même Shrek, le premier, annonce une animation irrévérencieuse, bousculant les codes du « tout le monde, tout le monde il est gentil ». Avec deux productions par an, on ne peut prétendre à un niveau d’excellence en permanence, le dernier opus Creed crée la surprise en lorgnant même du côté de la philosophie, puisqu’on peut l’apparenter au mythe de la caverne de Platon. Aujourd’hui arrive un petit escargot assez lisse dans sa forme virtuelle, un effort aurait pu être fourni de ce côté. Pour le reste, nous partons de l’univers du jardin où les gastéropodes côtoient un serval escargot en tricycle, écrabouillant tout insecte passant à portée de ses trois roues. Il manque certes à Turbo la profondeur de Jonathan Livingtson le goéland pour intéresser les grands. Mais cessons de juger à l’aune de nos regards d’adultes un film qui, avant tout, s’adresse aux enfants comme pour Planes, peut-être un étage au-dessus.
De ce fait, les improbabilités ne gênent pas ce genre de public, escargots et humains peuvent vivre en bonne entente, sans que la cible ne s’en inquiète. Ils gardent encore l’univers du rêve et de l’improbable où une voiture et un avion peuvent parler, alors, a priori pour un escargot, quoi de plus naturel ? L’univers est assez bien troussé pour sa cible, les personnages rencontreront l’approbation des minots. Ne soyons pas fous, il ne révolutionnera pas les cours de récréation. J’ai bien peur qu’à la rentrée, la chose soit oubliée, rangée dans les tiroirs des souvenirs de vacances. Il existe des films qui révolutionnent l’univers de l’animation, d’autre comme Turbo qui se contentent de faire proprement leur boulot.
Nous étions peut être trop habitués à un renouveau, un double discours adultes enfants, un jeu où, dans une première lecture, nos bambins trouvaient leur compte et dans les recoins (ou second degré) les adultes s’abreuvaient de références, clins d’œil au genre. Nous sommes dans un film formaté pour les vacances, ciblé pour les plus petits comme Planes, moins exigeants que les adultes. Il faudrait juste que le calme creux ne dure pas trop longtemps.