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affiche Silence

Silence

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Un film de Martin Scorsese ,
Avec Andrew Garfield, Adam Driver, Liam Neeson,

Genre : Historique
Durée : 2h41
États-Unis

En Bref

             « Notre Seigneur leur a dit : « Allez dans le monde entier porter la bonne nouvelle »

Saint François-Xavier avait découvert le Japon et évangélisé ses populations avant de devenir un Saint. Des années plus tard, le Shogunat revient sur la liberté de culte, trouvant cette nouvelle religion nocive pour le pays. Nous sommes en 1638, les idées de la Réforme gagnent une grande partie de l’Europe et deux prêtres portugais débarquent au Japon. Ils souhaitent retrouver leur mentor, le père Ferreira. Ce dernier aurait apostasié, renié sa foi. Il ne fait aucun doute pour les deux jeunes prêtres que ce retournement ne peut avoir eu lieu que sous l’effet de la torture. Ils arrivent dans un pays où le christianisme ressemble à celui des origines, quand l’on suivait les signes pour se rassembler en secret dans les catacombes de Rome. Accueillis en libérateurs, ils découvrent la ferveur de tout un village heureux de les voir comme des porteurs de la bonne nouvelle, comme les disciples de Jésus. Ils entrent dans la clandestinité pour porter la lumière dans ce monde de ténèbres.

Plusieurs fois, leur guide, Mokichi, renie sa foi comme Pierre avait renié le Christ. « Avant que le coq chante deux fois, tu me renieras trois fois ». Pendant que le père Francisco Garupe reste auprès de ses ouailles, le jeune Sebastião Rodrigues décide de continuer la quête. Il suit les rumeurs qui mènent au Père Cristóvão Ferreira. Arrêté par les hommes d’Ichizo, l’inquisiteur de la province, il découvre l’envers du décor idyllique. C’est la torture, la pression pour abjurer, apostasier sa foi, renier le Christ au chant du coq. Ce sont ces villageois crucifiés face à l’océan, condamnés à mourir dans des tortures insoutenables. Il finit par toucher au but, mais sa rencontre avec Cristóvão Ferreira lui réserve bien des surprises.  


« C’est dans les clameurs de notre conscience que nous cherchons la route qui mène à Dieu. C’est dans le silence, au sommet de la montagne, que nous le rencontrons. »

C’est un film magnifique où la foi est examinée sous toutes les coutures. Il est adapté du livre Silence de Shūsaku Endō, écrit en 1966. C’est pourtant le texte des origines du Père Cristóvão Ferreira qui nous éclaire le plus. Vous pouvez le retrouver aux éditions Chandeigne sur un commentaire de Jacques Proust La supercherie dévoilée. Il n’était pas étonnant que ce cinéaste qui hésitait entre le séminaire et le cinéma s’attache à cette histoire. Il la porte en lui depuis longtemps, elle trouve son achèvement aujourd’hui. Depuis longtemps cette notion de foi hante le cinéma de Scorsese, que ce soit en dieu ou en la mafia. Nous la retrouvions au cœur de La dernière tentation du Christ. C’est un dieu de souffrance et un dieu de compassion qui s’affrontent dans ce Japon découvrant l’occident. Le représentant du Shogun, l’inquisiteur aura cette phrase pleine de sens : « Le prix de votre gloire est leur souffrance ».

Le film s’ouvre sur une scène de torture où le silence se couvre du murmure de la souffrance. Il s’achève dans la mansuétude et la compassion des cendres. C’est la route qui conduit à l’éveil, quand au sommet de la montagne, chacun comprend qu’il n’existe pas qu’un seul chemin pour atteindre le divin. Silence explore donc la foi sous tous ses angles, celui de résistance qui conduit à ne pas renier le Christ malgré les tortures. C’est bien elle qui permet au pénitent de tenir face à la douleur. Elle est plus grande que la mort, car elle conduit à Dieu dans son immense miséricorde. C’est le doute qui assaille un instant le jeune Sebastião Rodrigues. Quel prix donner à cette foi qui fait mourir ? Comment ne pas piétiner les idoles qui ne sont que du bois ? Est-ce renier Dieu ? Le personnage de Mokichi n’hésite pas pour sauver sa peau, à marcher sur l’image du divin. Il se fait confesser et pardonner à chaque fois. L’image n’est pas le fond de son âme qui reste fidèle à sa croyance.

Dans le Bouddhisme, le lieu de la pratique est partout où je médite. C’est un Dieu de lumière que nous dévoile Scorsese au cœur des paysages, loin des églises. L’espace devient la parole du Seigneur, le silence de la nature, le bruit de l’océan, les mots de dieu au croyant. Tout à coup, le réalisateur urbain se métamorphose en celui de la nature. C’est dans la capture de l’espace qu’il nous surprend. La séquence de crucifixion face à la mer est un des exemples les plus marquants. L’utilisation du paysage montre un homme libéré de la contrainte du béton de la ville. Il est peut-être une métaphore de la foi du réalisateur du brouhaha des villes, il devient silence. Ce silence, dans l’idée du bouddhisme japonais, comme Mu le vide plein, contenant tout. Andrew Garfield trouve avec le personnage de Sebastião Rodrigues un rôle magnifique tout en finesse, jouant sur le silence et le vide avec justesse.

Il en est de même d’Adam Driver dans celui du père Francisco Garupe. Liam Neeson nous réconcilie avec l’acteur dans une belle performance sur ce prêtre reniant sa foi et en découvrant une autre. Le personnage de Ferreira existe vraiment. C’est l’un des meilleurs théologiens de l’église de l’époque. Il part évangéliser le Japon. Pourtant sa conscience vacillait déjà sous les idées de la réforme. Il n’est donc point étonnant qu’il bascule dans le Zen. Il réalise un petit texte expliquant son apostolat. Pour finir, nous préciserons qu’aujourd’hui, dans certains monastères jésuites, on pratique la méditation du Zen. Peut-être n’avait-il pas renié Dieu au plus profond de lui même. Cela nous amène à la grande question que pose le film. Elle était déjà celle de La dernière tentation du Christ. Qu’est-ce que Dieu ? Où est-il ? Dans ce film brillant, Martin Scorsese nous donne sa réponse.

Patrick Van Langhenhoven

Note du support : n/a
Support vidéo :
Langues Audio :
Sous-titres :
Edition :


Titre original : Silence

    Réalisation : Martin Scorsese

    Scénario : Jay Cocks et Martin Scorcese, d'après Silence de Shūsaku Endō

    Direction artistique : Wen-Ying Huang

    Décors et costumes : Dante Ferretti

    Photographie : Rodrigo Prieto

    Montage : Thelma Schoonmaker

    Musique : Howard Shore

    Production : Vittorio Cecchi Gori, Barbara De Fina, Randall Emmett, Gaston Pavlovich, Martin Scorsese, Emma Tillinger Koskoff et Irwin Winkler

    Sociétés de production : Cappa Defina Productions, Cecchi Gori Pictures, Fábrica de Cine, SharpSword Films, Sikelia Productions, Verdi Productions, Emmett/Furla/Oasis Films et Waypoint Entertainment

    Sociétés de distribution : Paramount Pictures (États-Unis), Metropolitan Filmexport (France)

    Budget : 40 000 000 $

    Pays d’origine : États-Unis, Taïwan, Mexique

    Langues originales : anglais, japonais

    Format : Couleurs (Fujicolor) - 35 mm - 2,35:1 - Son Dolby numérique

    Genre : drame historique

    Durée : 161 minutes

    Dates de sortie :8 février 2017

Distribution

     Andrew Garfield (VQ : Gabriel Lessard)  : le père Sebastião Rodrigues

    Liam Neeson (VQ : Éric Gaudry) : le père Cristóvão Ferreira

    Adam Driver (VQ : Nicholas Savard L'Herbier) : le père Francisco Garupe

    Ciarán Hinds : le père Valignano4

    Tadanobu Asano : l'interprète des prêtres

    Shinya Tsukamoto : Mokichi5

    Yōsuke Kubozuka (en) (VF : Vincent de Bouard) : Kichijiro

    Issei Ogata (VF : Patrice Dozier) : Inoue6

    Nana Komatsu (en) : Christian Villager

    Ryō Kase : Christian Villager

    Michié : la femme de Tomogi

    Sabu :

    Yoshi Oida : Ichizo

    Shun Sugata (VF : Serge Faliu) : le commandant samouraï

    Motokatsu Suzuki : Edo Guard

    Yasushi Takada : Doshin

    Katsuo Nakamura : Buddhist Priest

    Ten Miyazawa : Carpenter