Retour à Bollène

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Un film de Saïd Hamich ,
Avec Anas El Baz, Kate Colebrook, Saïd Benchnafa,

Genre : Drame psychologique
Durée : 1h07
France

En Bref

Nassim est parti vivre à Abu Dhabi. Il a quitté la ville pour d’autres horizons et pour se construire une nouvelle raison. Fiancé à une Américaine, il revient au pays, à Bollène, quatre ans plus tard. C’est le temps des retrouvailles et peut-être de l’oubli et du pardon. Il retrouve sa famille qui n’a pas changé, traçant sa route dans cette ville, aujourd’hui sinistrée. C’est la quête d’un homme qui s’est égaré en route et a perdu son chemin. Il ignore encore que cette balade au cœur de la ville, ses haltes chez les vieux amis d’hier, bousculeront le jeune homme accompli. Il comprend qu’il lui manque une part de son identité, reniée, pour être complète et construire son avenir. Ce qui l’attend n’est pas ce qu’il espérait, la ville change, bouge avec le temps et se teinte de désespoir. Ailleurs, le rêve semble possible. A Bollène, on traine son spleen en espérant échapper au tombeau qui vous ensevelit. Pourtant, c’est ici que tout se brise, éclate, explose, dans le vent des silences et des non-dits pour reprendre forme. Il n’y aura pas de mots pour la réconciliation, uniquement de la douleur.

C’est le premier film de Saïd Hamich producteur de Much Loved, Volubilis, Vent du nord, renouveau d’un cinéma marocain et d’un cinéma français maghrébin. Il appartient à cette vague de jeunes réalisateurs qui n’hésitent pas à aborder des thèmes difficiles. Retour à Bollène est d’abord un film de sentiments. Il traite de l’amour filial, paternel, du couple. Il gratte en profondeur derrière le regard sur une ville sinistrée, sans âme. Il est le voyage d’un homme habité par la haine. Il finira par la perdre pour trouver la douleur qui se guérit. Nassim ignore qu’en revenant sur les terres de son enfance, il plonge dans une quête qui le conduit à l’éveil. Après la joie des retrouvailles, apparaissent les fractures entre ce jeune homme qui change de classe et sa famille plus humble. Le père, nous l’apprendrons plus tard, travaille chez un maraicher. Dans cette fratrie, le mot amour semble difficile à accoucher. La mère est la seule qui le porte, comme une source jamais tarie. Plus il avance au cœur de la ville et des rencontres, plus il comprend que sa place n’est plus ici. Pourtant, nous n’échappons pas à nos racines.

Elles sont ce qui nous transforme, le terreau, la fondation sur laquelle nous bâtissons notre vie. Peu à peu, Nassim découvre qu’il possède bien plus en commun avec cette famille qui ne le renie pas. « Je ne veux pas être un Arabe de Bollène » dit Nassim à sa sœur. Elle lui répond : « Tu n’as même pas idée à quel point on sait tout ça et que l’on t’accepte et qu’on t’aime ». Dans cette phrase, tout est dit sur le cœur du film et de ses non-dits qui finissent par tuer les sentiments. C’est dans les silences que se niche le cœur du récit. C’est dans le regard des autres et des moments de partage manqués qu’il révèle le désespoir des élans perdus. Au bout de la route, il comprend qu’il ressemble bien plus à son père. Il est temps d’ouvrir la dernière porte, même si la douleur est au bout. Il perd la haine pour gagner cette dernière et pouvoir enfin se reconstruire, comme nous le dit Saïd Hamich dans notre interview. Plus que d’identité, retour à Bollène nous parle de sentiments. C’est en cela qu’il nous touche et devient universel dans son discours. Il dévoile toute une bande de jeunes acteurs excellents que nous aimerions voir plus souvent dans le paysage du cinéma français.

Patrick Van Langhenhoven