Première Année

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Un film de Thomas Lilti ,
Avec Vincent Lacoste, William Lebghil, Michel Lerousseau,

Genre : Comédie dramatique
Durée : 1h32
France

En Bref

Antoine est un carabin qui joue sur la durée, en renouvelant sa première année. Il redouble pour la troisième fois, alors que Benjamin entame la première saison. Pour Antoine c’est une véritable vocation à laquelle il s’accroche malgré ses échecs répétés. Benjamin suit les traces de son père dans l’esprit de tradition de la famille, lui-même médecin. Le premier est un vieux routard du système qui en connaît tout les ficelles et l’aspect sans pardon de la compétition. Le premier découvre que la médecine est loin du monde des Bisounours, la compétition est rude et sauvage, violente. C’est une course à la meilleure place qui déterminera les futurs choix de tous ces carabins en devenir. Antoine et Benjamin choisissent par l’effet du hasard et de l’amitié qui se noue de lier leurs sorts. Ils se lancent dans la bataille réunissant les talents de chacun pour un objectif commun. Le sens de l’organisation, le pragmatisme, et un papa toubib aide l’équipe à ne pas se disperser. Les nombreuses années, remettre le travail sur la table d’opération de l’autre apporte un plus. Cette première année devient vite une route initiatique que chacun appréhende à sa façon pour mieux grandir. Il faudra des sacrifices et oublier les artifices pour se comprendre et partager l’avenir.

Thomas Lilti touche juste avec l’annonce de la réforme de la première année de médecine en même temps que la sortie du film. Après un premier long métrage, loin de ses études et de son métier de médecin Les yeux bandés, il devient malgré lui, après Hippocrate et Médecin de campagne, le chantre d’une profession. Nous retrouvons dans cette Première année, un sujet qu’il porte en lui depuis longtemps, à la fois le regard juste sur une profession et sa capacité à en saisir toute l’humanité à travers ses personnages. Derrière le milieu souvent rude et difficile, il explore les liens que tissent des individus, un groupe d’internes aux ambitions divers, une jeune femme face à un homme de conviction, deux étudiants aux parcours et désirs différents. C’est bien toute cette fragilité des êtres confrontés à la réalité du monde qui marque de son empreinte profonde ses films. Dans cette Première année Benjamin et Antoine, double du réalisateur, devront faire preuve d’un sens profond de l’amitié pour dépasser les obstacles.

Il nous entraîne dans cette compétition comme dans un film de suspens à l’issue cruciale pour toute une vie. Le spectateur s’accroche aux relations et sentiments des deux héros pris dans la frénésie d’une course à la réussite. Antoine emporté par son désir de réussir en oublie parfois l’essentiel. Benjamin n’a plus d’yeux que pour cet objectif de peur de décevoir ses frères, son père, sa mère. Il ne voit pas la petite voisine attentionnée qui le dévore des yeux. Dans une mise en scène enlevée et sobre touchant au principal, il nous captive avec cette histoire simple. Tout est dans le détail de la vie se jouant sur un examen en fin d’année, de la caméra saisissant sur le vif la vie aux décors des chambres d’étudiant et autre.

Cette radiographie douce et amère avec un soupçon de tendresse nous touche au plus profond de notre être. Elle possède un rien d’universel dans ses propos sur les sacrifices, les choix, que nous faisons pour bâtir notre vie dans cette première année décisive. C’est bien la force de Thomas Lilti au travers d’un sujet qu’il connaît sur le bout des doigts, devenir universel dans son discours. Il est servi par deux comédiens lui offrant le meilleur. Vincent Lacoste retrouve peut-être son personnage d’Hippocrate dans sa première année. La surprise vient de William Lebghil depuis ses premiers la dans comédie. Il n’a de cesse de choisir des rôles plus dramatiques montrant ses capacités à jouer sur des registres variés. Il trouve avec Benjamin un personnage qui lui permet de dévoiler sa capacité à prétendre à d’autre rôle que le rigolo de service.

Patrick Van Langhenhoven

L'avis contre de Françoise

La fac de médecine est un monde en soi. Lorsqu’on y pénètre, plus rien d’autre n’existe. Le comité d’accueil des profs ne fait rien pour vous encourager. L’institution mise sur la capacité de résistance des étudiants pour en faire des guerriers du soin. Pas d’apitoiement, pas de faiblesse, il faut tenir et dépasser le voisin. En ce sens, Lilti touche juste. De la même façon, il montre comment le fiston devient un être mutant, un habitant d’une autre planète, quand la maman vient voir comment se passent les révisions et que la seule réponse, un rien arrogante, est : « tu ne peux pas comprendre ».

On ne peut que souscrire à l’enthousiasme du réalisateur et son envie de faire partager ce parcours tout à fait spécial qui est le lot des apprentis toubibs. Mais comment ne pas voir les grosses ficelles qu’il utilise pour nous instruire ? Si, nous pouvons comprendre. Il n’est pas nécessaire de faire un gros plan en plongée sur une chambre envahie de bouquins ouverts et Benjamin qui pionce au milieu. Il est d’autres moyens de montrer des étudiants au travail que de les faire ânonner des termes d’anatomie ou de chimie qui n’apportent rien à l’histoire. On a compris !

Thomas Lilti a pris le pari de la fiction pour faire « avaler la pilule ». Et ce parti pris affaiblit le propos, même si les deux personnages sont sympathiques. On sent l’écriture, pas très fine, sous le film. Le réalisateur hésite entre autobiographie et fiction, il ne fait pas confiance à son public. Dommage. Cela dit, Première année se voit sans déplaisir et on salue l’entreprise de Lilti d’essayer de montrer les choses de l’intérieur.

Françoise Poul