Cine-Region.fr
affiche Manchester by the sea

Manchester by the sea

___

Un film de Kenneth Lonergan ,
Avec Casey Affleck, Michelle Williams, Kyle Chandler,

Genre : Drame psychologique
Durée : 2h18
États-Unis

En Bref

Il y a le temps de la douleur chevillée au corps assassin. Elle se glisse dans le cœur de Lee pour faire son nid et ne plus en partir, coucou famélique grandissant. Il fuit ses fantômes trop pesants. C’est un homme à tout faire, concierge à Boston, l’oubli arrive quelquefois quand le vent intérieur n’est pas trop mauvais. D’autres fois, ils reviennent, et avec eux l’envie de s’autodétruire, une bonne bagarre dans un bar. Elle ne suffit pas à les effacer. Loin du pays de son enfance, de sa faute trop grande pour espérer le pardon, il se construit une vie de zombie. Ours bourru, il rentre le soir dans sa cage, son sous-sol pour expier. Lorsque son frère meurt lui confiant la garde de son neveu Patrick, le temps de la rédemption plantera peut-être dans son cœur une fleur de printemps dans cette tempête d’hiver.

De retour au pays, rien ne va plus, il n’a qu’un souhait, fuir de nouveau, comme hier marqué du sceau maudit. Chaque rue, chaque lieu lui rappellent la faute et son expiation éternelle comme Sisyphe et son rocher. Pour lui, l’espérance se perd dans l’horizon où les bateaux s’en vont quérir le poisson. Il se perd dans la neige qui tombe à petits flocons et le froid semblable à celui des morts qui vous ronge. Il ne possède qu’une envie, retourner dans sa prison. Patrick son neveu, souhaite construire sa vie au pays de ses origines sur les pas de son père. Comment la mort et la vie la douleur et l’espoir du bonheur peuvent-ils s’épouser ? La rédemption est une terre promise que certains n’atteindront jamais. C’est ce chemin et bien d’autres que le film nous invite à partager.


La rédemption, un de mes thèmes favoris, quand le chemin conduit des ténèbres à la lumière, quand le pardon s’oppose à haine pour guérir l’âme et l’élever. Après la douleur, la peine sans mesure, il existe en général dans le cinéma, une route pavée de douleur conduisant au bonheur. C’est bien toute la réflexion qui conduit le voyageur fatigué de vivre à ne pas mourir. Il existe aussi un temps pour le pardon. Randi, la femme de Lee, a beau le lui accorder, il existe un malheur trop profond pour que l’horizon ne soit pas que tempête. C’est la vie au cœur de l’hiver dans l’attente du printemps pour enterrer un corps face à la mort et aux fantômes qui l’accompagnent. Lee est un homme qui survit, la mort serait son paradis, mais elle ne veut pas de lui. Il doit porter sa croix, suivre son chemin de l’éternel recommencement comme le rocher de Sisyphe. Ailleurs, les lieux ne lui rappellent jamais ce que sa mémoire veut effacer. Kenneth Lonergan nous livre la vérité, le poids du drame par petits morceaux, des trames qui apparaissent dans le cœur de Lee, en images pour le spectateur.

Peu à peu, nous comprenons qu’un évènement majeur a détruit ce couple possédant toutes les apparences du bonheur. Comment une vie vole en éclats, éclaboussant l’âme du voyageur de son encre de ténèbres. Le diable ne se niche nulle part ailleurs qu’en nous. Petit génie malicieux, il joue d’un rien pour faire basculer une chaude soirée en expiation éternelle. Le cœur du film trouve toute sa force dans ces deux extrêmes, entre Randi qui finit par retrouver le chemin de la vie. Magnifique Michelle Williams, le réalisateur construit en quelques séquences un personnage fort et dense. Elle aura beau pardonner, aimer, Lee n’est déjà plus ici. Lee porté par le talent de Casey Affleck nous offre l’un de ses plus beaux rôles. Il est hanté par ses fantômes trop lourds à porter. Même son neveu pour qui il a beaucoup d’affection n’en efface pas la trace. Les lieux deviennent un enfer, un leitmotiv au poème de douleur, impossible de vivre ici. Il finit par avouer que c’est trop dur.

C’est deux vies frappées par la mort. L’une se désintègre et se perd dans les limbes. L’autre, Patrick, cherche dans les flocons qui tombent non pas la tempête mais l’annonce du printemps à venir. Lee ne peut aimer, ne peut se confronter au monde qu’avec hargne et colère, Patrick est en quête de l’amour, d’une vie à bâtir quand celle de son oncle n’est plus qu’un tas de cendres. Le réalisateur s’appuie sur le paysage qu’il sublime à travers ses images. Un petit port tranquille, des rues sous la neige, les forêts, une balade en bateau, une partie de pêche, le plan devient large, emplit le cadre, ouvre l’horizon et la saison de l’hiver devient douce. En opposition, le début montre ce grillage, barreaux d’une prison imaginaire, gros plan travaillé par le silence et la douleur qui ne ride même pas le visage.

Chaque personnage est travaillé, sculpté, de la mère de la petite amie de Patrick, le coach de Hockey, Randi l’ex-femme de Lee, George l’ami fidèle de son frère, etc. Ils trouvent leur place, leurs mots appuient et renforcent le récit dans lequel lire entre les lignes nous en livre un peu plus sur l’impossible retour. Dans Manchester by the sea, la tristesse nous livre sa parabole sur le bonheur. Il faut attiser ici et maintenant à chaque instant, la petite flamme que nos cœurs apprivoisent avec difficulté tout au long d’une vie.

 Patrick Van Langhenhoven

Avis de Françoise Poul

Voilà tout de même un cinéaste qui se paie le luxe de filmer l’inmontrable avec des dialogues qui mettent en avant l’indicible. Les sentiments des personnages, toujours intériorisés, sont palpables, à hauteur de l’épiderme. Et plus la tristesse est présente, plus la douce lumière d’hiver nous enveloppe comme un manteau de survie.

Lee s’interdit de ressentir quoi que ce soit. C’est sa part d’autopunition, suite au drame qu’il a vécu et dont il s’accuse. C’est aussi une forme de protection, il faut ne laisser entrer aucune émotion, ni les bonnes ni les mauvaises sous peine de rouvrir la plaie béante qui ne sera jamais suturée. Rien d’étonnant à ce que de temps à autre, ses poings parlent à sa place, quand la pression est trop forte.

Patrick, lui, est une victime à part entière. Il subit le deuil de son père de plein fouet, il est innocent et la vie se dérobe sous ses pieds. Il est à la merci des décisions des adultes dont on peut se dire que jusqu’à présent, ils n’ont pas été d’une grande ressource pour lui. Et voilà qu’on veut lui ôter la part de vie qu’il s’est construite… De la sensibilité, il en a pourtant. La scène de sa visite à la morgue vaut tous les discours. Rarement on aura réussi un tel portrait d’ado, bougon, revêche car écorché, mais prêt à défendre son idéal et pourquoi pas à jouir de la vie quand l’occasion se présente. Il est encore « frais », l’existence ne l’a pas encore aigri, rendu amer, revanchard ou plaintif.

 Voilà tout de même un cinéaste qui se paie le luxe de déconstruire son récit sans craindre de bousculer un peu le spectateur, pour mieux lui faire sentir toutes les nuances du récit.

 Voilà tout de même un film qu’il faudrait ne pas rater car ils ne sont pas si nombreux à atteindre ce niveau de cinéma.

F POUL

Note du support : n/a
Support vidéo : Format 16/9 compatible 4/3, Format cinéma respecté 1.85, Format DVD-9,
Langues Audio : Anglais, Espagnol , Français Dolby Digital 5.1
Sous-titres : Français
Edition : Universal

Bonus:

Scènes coupées :

  • - La charte des Chandler
  • - Les obsèques des enfants
  • - L'appel d'Elise
  • Des vies émouvantes : la création de Manchester By the Sea
  • Commentaire audio de Kenneth Lonergan

    •       Titre original : Manchester by the Sea

    •       Réalisation et scénario : Kenneth Lonergan

    •       Direction artistique : Ruth De Jong

    •       Décors : Florencia Martin

    •       Costumes : Melissa Toth

    •       Photographie : Jody Lee Lipes

    •       Montage : Jennifer Lame

    •       Musique : Lesley Barber

    •       Production : Lauren Beck, Matt Damon, Chris Moore, Kimberly Steward et Kevin J. Walsh

Coproducteur : Ryan H. Stowell

Producteurs délégués : Declan Baldwin, Josh Godfrey, John Krasinski et Bill Migliore

    •       Sociétés de production : The Affleck/Middleton Project, B Story, Big Indie Pictures, CMP, K Period Media et Pearl Street Films

    •       Sociétés de distribution : Amazon Studios (États-Unis), Universal Pictures International France (France)

    •       Budget : n/a

    •       Pays d'origine : États-Unis

    •       Langue originale : anglais

    •       Format : couleur

    •       Genre : drame

    •       Durée : 135 minutes

    •       Dates de sortie1 :14 décembre 2016

Distribution

    •       Casey Affleck (VF : Jean-Christophe Dollé) : Lee Chandler

    •       Michelle Williams : Randi

    •       Lucas Hedges (en) (VF : Gabriel Bismuth) : Patrick Chandler

    •       Kyle Chandler (VF : Emmanuel Curtil) : Joe Chandler

    •       C.J. Wilson : George

    •       Gretchen Mol : Elise

    •       Kara Hayward : Silvie

    •       Heather Burns : Jill

    •       Matthew Broderick (VF : William Coryn) : Rodney

    •       Ruibo Qian : docteur Bethany

    •       Tate Donovan : l'entraineur de hockey