La métamorphose a déjà commencé. Peu à peu, ici et là, des hommes et des femmes changent de peau, mutent. Pour l'instant, ce n'est qu'un murmure au cœur du monde, une vague qui grandit pour devenir tsunami. François et son fils Emile sont touchés par cette mutation. La femme, la mère, n'est déjà plus qu'un écho. Est-ce la dernière visite à ce qui reste d'humanité dans un regard quand le corps devient autre ? François décide d'accompagner celle qu'il aime jusqu'au bout de ce changement. Pour où ? Emile vit difficilement cette période, la perte d'une mère qui n'est déjà plus la même, ni encore une autre. Dans cette tempête qui transforme les humains en animaux, est-ce que les créatures gardent leur conscience humaine ? Parquées comme des bêtes dans un centre isolé, elles s'échappent avec d'autres pour se perdre dans la forêt. François entraine Emile dans cette quête pour retrouver, renouer avec celle qu'ils ont aimée. Ils croiseront d'autres victimes de cette métamorphose. Ils ignorent encore que cette quête les entrainera au cœur d'un impossible retour.
« Ce qui vient au monde pour ne rien troubler ne mérite ni égards ni patience » René CharDéjà dans Les combattants Thomas Cailley mélangeait les genres. Comme pour Acide, derrière les pluies de Just Philippot, se cache un regard profond sur la famille. Le règne animal peut se voir comme une métaphore de l'adolescence d'un père et d'un fils qui s'émancipent. Cette quête de la mère, celle qui donne la vie, mène Emile à devenir un autre. C'est aussi un film sur l'altérité, l'autre qui vient d'ailleurs et le regard que l'on porte sur lui. Cailley parle du lien que nous entretenons avec notre environnement, avec le monde, avec l'animal. Au cœur de la mutation de l'homme vers l'animal se glisse une question plus intime. On imagine que demain le monde ne sera plus qu'un ensemble d'animaux vivant une humanité différente. Est-ce que la prochaine mutation de l'homo sapiens est homo animal ? Est-ce qu'il garde ou retrouve une conscience humaine ? Et c'est quoi la pensée animale ? Autant de questions que nous nous posons aujourd'hui.
Le règne animal dans sa vision cosmique nous interroge sur la place de l'animal dans nos sociétés. Il ne s'inscrit pas dans le courant antispéciste mais rejoint certaines questions de celui-ci. Les antispécistes estiment que tous les animaux, humains compris, sont d’égale importance, que leur sensibilité et leurs souffrances doivent être prises en compte. Dans sa mise en scène, Cailley part de l'urbain, la ville de béton, comme le centre où les créatures sont parquées. Puis très vite s'ouvre sur la nature, la forêt qui peut être celle des contes, de la transformation du chamane, de l'individu qui la traverse. C'est le voyage d'Emile qui n'hésitera pas à plonger dans son cœur, voire plus. François reste à la lisière, regarde ce fils partir vers cette nouvelle humanité. Le film s'ancre autour de la relation père fils et de cette autre mutation vers l'âge adulte. Il est temps de vivre sa vie pour Emile.
Julia, la gendarme, essaye de garder une certaine sérénité d'esprit face à ce bouleversement naturel. Elle est l'ordre, le port face au chaos de l'univers. Thomas Cailley comme Thomas Salvador choisit des trucages réels qui demandent un travail de maquillage important. Parfois il utilise une version 3D. La photographie est le résultat d'un travail minutieux et remarquable renforçant le discours poétique du film. C'est un jeu du cadre, du grain de l'image, des lumières changeantes, véritables ballets au sein de la forêt. Le règne animal est un film fort annonçant une vague de jeunes réalisateurs prometteuse, après Acide, avant Vincent doit mourir, liés à la nature, il nous rassure sur la bonne santé du cinéma français. Le règne animal nous interroge sur de nombreux sujets, religieux, sociaux, écologiques, poétiques. Cette dernière des créatures face aux humains est le chant profond de ce récit, de cet arbre aux rameaux multiples.
Patrick Van Langhenhoven
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Titre original : Le Règne animal
Réalisateur : Thomas Cailley
Scénario : Thomas Cailley, Pauline Munier
Musique : Andrea Laszlo De Simone
Décors : Julia Lemaire
Costumes : Ariane Daurat
Photographie : David Cailley
Montage : Lilian Corbeille
Effets spéciaux de maquillage : Frédéric Lainé, Jean-Christophe Spadaccini
Effets visuels : Cyrille Bonjean
Production : Pierre Guyard
Société de production : Nord-Ouest Films, StudioCanal, France 2 Cinéma, Artémis Productions
Budget : 15,96 millions d'euros2
Pays de production : France
Langue originale : français
Format : Couleurs - Son Dolby Digital
Genre : science-fiction, aventure, drame
Durée : 130 minutes
Dates de sortie : mai 2023 (Festival de Cannes 2023) 4 octobre 2023
Classification :Tout public avec avertissement lors de sa sortie en salles et déconseillé aux moins de 10 ans à la télévision.
Distribution Romain Duris : François
Paul Kircher : Emile
Adèle Exarchopoulos : Julia
Tom Mercier : Fix
Billie Blain : Nina
Xavier Aubert : Jacques
Saadia Bentaïeb : Naïma
Gabriel Caballero : Victor
Iliana Khelifa : Maëlle
Paul Muguruza : Jordan