« Tu restes le gentil qui se bat contre les méchants » Bobi Jewell sa mère.
Richard Jewell est un brave type qui rêve de rester le gentil qui combat les méchants. Dans ses différents postes, on ne peut lui reprocher que de l’excès de zèle. Respectueux de la loi, il déborde d’enthousiasme à l’université du Piedmont. Devant les complications de son comportement, longs rapports pour un rien, contrôles abusifs, la direction lui demande gentiment de démissionner. Il s’occupe des fournitures de la Small Business Administration tout en espérant une embauche dans les forces de l’ordre. Il se lie d’amitié avec Watson Bryant, avocat de la maison. Richard Jewell est un homme simple.
Il respecte la loi jusqu’au bout des ongles. Il vit avec sa mère, rigoureuse et aimante, dans un petit pavillon d’une de ces banlieues américaines. Nous le retrouvons en 1996 aux jeux Olympiques d’été d’Atlanta comme agent de sécurité du parc du centenaire. On donne de nombreux concerts pendant que les athlètes s’affrontent sur les pistes. Richard Jewell, lors d’un contrôle de jeunes alcoolisés, découvre un sac à dos suspect. Il n’hésite pas une seconde, alerte les démineurs, établit un périmètre de sécurité, sauvant de nombreuses vies. C’est le temps de son heure de gloire. Hélas, celle-ci sera de courte de durée. Il passe très vite du statut de héros à celui de coupable. C’est l’heure de la curée et du déshonneur d’un homme. C’est le combat d’un homme bafoué croyant encore en la justice ! Il trouve dans Watson Bryant l’avocat idéal pour mener la bataille contre le pouvoir le plus puissant de la planète.
« Le jour où il a commis un acte héroïque, il l’a payé au prix fort et a été jeté en pâture aux lions. » Clint Eastwood
Eastwood s’intéresse aux histoires vraies depuis L’échange en 2010. Il aime ses personnages, souvent ordinaires, confrontés à la dure réalité du monde. Il pointe du doigt, sans vraiment un esprit de revendication, certains dysfonctionnements de la société américaine. Il renouvelle l’angle de sa thématique du héros avec American Sniper, Sully, 15 h 17 pour Paris, Invictus, Le cas Richard Jewell. Comme le fait remarquer un critique, ces histoires sont souvent liées au traumatisme du 11 septembre. Cette figure mythique est loin des personnages grandiloquents de John Wayne. Les héros de Clint Eastwood, déjà dans la partie western, ne font pas de bruit, sauf peut-être L’Inspecteur Harry. Ils défendent tous, dans un certain esprit de chevalerie, la veuve et l’orphelin, l’innocent, les plus faibles, l’ordre et la justice.
Gran Torino marque la fin des Josey Wales, Pale Rider, dernières figures, passage entre William Munny d’Impitoyable et Earl Stone de La Mule. Dans Le cas Richard Jewell, nous retrouvons le basculement du statut de héros à celui de coupable, comme dans Sully. Tous deux seront soupçonnés, l’un pour ne pas avoir réagi de façon idéale, l’autre pour passer du statut d’anonyme à héros. Dans la réalité, les enquêteurs du FBI trouvent dans Richard Jewell le coupable parfait. Ils s’appuient sur le cas d’un policier aux jeux Olympiques de Los Angeles en 1984. Celui-ci trouve une bombe qu’il a lui-même posé dans un bus. C’est ce basculement qu’examine Clint Eastwood avec un personnage naïf, idéaliste, qui ne se rend pas compte qu’il est temps de sauver sa peau. À la naissance du projet, Jonah Hill devait tenir le rôle de Richard Jewell, et Leonardo DiCaprio celui de l’avocat. Finalement, c’est Paul Walter Hauser, un acteur peu connu qui l’endosse avec talent.
« Dans mon pays, quand le gouvernement accuse quelqu’un, c’est qu’il est innocent. C’est différent chez vous » Secrétaire de Watson Bryant.
La deuxième thématique, on la retrouve depuis peu dans l’œuvre d’Eastwood, le poids des médias et du gouvernement, cette machine à broyer les âmes simples. L’emportement des journaux, véritable vague, détruit le pauvre Richard dans une tourmente sans pardon. Malgré les faits, le FBI poursuit sur sa lancée, suivi par la presse. Richard Jewell ne s’en remettra jamais, malgré la reconnaissance, bien des années plus tard, de l’état de Géorgie. À 90 ans, la mise en scène devient de plus en plus épurée, visant l’essentiel en quelques plans. Dans un premier temps, il plante le décor, présente les personnages. En quelques touches, il saisit les personnages principaux, Richard Jewell, sa mère, Watson Bryant, son avocat, l’agent du FBI et la journaliste Kathy Scruggs.
L’attentat marque le moment pivot de l’histoire. En quelques images tout est dit sans besoin d’en rajouter. C’est dans la troisième partie qu’Eastwood développe ses thématiques, étaye son discours dans une mise en scène parfaite. Il se permet même des clins d’œil qu’il glisse comme le flingue de l’inspecteur Harry rappelant l’ordre et la justice, valeurs chères à Richard. L’un des derniers plans flirte même avec la métaphore. La mère retrouve tous ses Tupperwares, tachés à jamais, comme l’honneur de son fils. Laissons le dernier mot à Clint Eastwood. « L’histoire de Richard Jewell m’a intéressé parce que c’était quelqu’un de normal, un monsieur Tout-le-Monde. C’est pour cela que je voulais faire ce film pour réhabiliter l’honneur de Richard. C’est un homme comme les autres, qui aspirait à devenir policier avant tout pour contribuer au progrès de l’humanité. »
Patrick Van Langhenhoven
Titre français : Le Cas Richard Jewell
Titre original : Richard Jewell
Titre de travail : The Ballad of Richard Jewell
Réalisation : Clint Eastwood
Scénario : Billy Ray, d'après un article de Marie Brenner (en)
Direction artistique : Chris Craine
Décors : Kevin Ishioka
Musique : Arturo Sandoval
Photographie : Yves Bélanger
Production : Jennifer Davisson, Leonardo DiCaprio, Clint Eastwood, Jonah Hill, Jessica Meier, Kevin Misher et Tim Moore
Producteur associé : Andy Berman
Sociétés de production : Warner Bros., Appian Way, Misher Films et Malpaso Productions
Sociétés de distribution : Warner Bros. Pictures (États-Unis, France)
Pays d’origine : États-Unis
Langue originale : anglais
Format : couleur
Budget : 45 millions de dollars3
Durée : 129 minutes
Genre : drame biographique,
Dates de sortie : 19 février 2020
Distribution
Paul Walter Hauser (VQ : Stéphane Rivard) : Richard Jewell
Sam Rockwell (VF : Damien Boisseau ; VQ : Gilbert Lachance): Watson Bryant (basé sur L. Lin Wood (en))
Kathy Bates (VQ : Claudine Chatel) : Barbara "Bobi" Jewell
Jon Hamm (VF : Jérémie Covillault ; VQ : Patrick Chouinard): Tom Shaw
Olivia Wilde (VF : Barbara Beretta ; VQ : Catherine Proulx-Lemay): Kathy Scruggs
Ian Gomez (VF : Bernard Gabay ; VQ : Tristan Harvey) : l'agent fédéral Dan Bennett
Wayne Duvall : l'examinateur du polygraphe
Dylan Kussman : Bruce Hughes
Mike Pniewski : Brandon Hamm
Nina Arianda : Nadya
Dexter Tillis : un policier
Niko Nicotera : Dave Dutchess
David Shae (VQ : Kevin Houle) : Ron Martz
Deja Dee : Alice Hawthorne
Bill Clinton (VQ : Daniel Picard) : Lui même
Alan Heckner (VQ : Frédéric Paquet) : Bill Miller