L'Effet aquatique

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Un film de Sólveig Anspach ,
Avec Florence Loiret-Caille, Samir Guesmi, Didda Jonsdottir,

Genre : Comédie romantique
Durée : 1h23
France

En Bref

Samir a la tête le plus souvent près des nuages, grutier il passe son temps tout là-haut, loin de la foule. Cette situation convient bien à ce garçon dégingandé et timide. C’est un jour pas comme un autre quand le hasard s’en mêle, qui change sa vie. Il croise la route d’Agathe dans un café alors que la belle éconduit de façon vive et décidée un prétendant indélicat. C’est elle, ce petit bout de femme pour ce grand bonhomme dont le cœur fait désormais boum, hop la boum ! Il n’aura de cesse de la retrouver.

Ça tombe bien, elle donne des cours de natation à la piscine de Montreuil. Il en oublie qu’il sait nager comme un gardon. Au début, il tombe sur une autre maître-nageuse un peu trop entreprenante. Il est prêt à tout pour changer de professeur, il veut l’élue de son cœur. En modifiant un rien le tableau des séances, en changeant un nom, il arrive à ses fins. C’est le début, mais comme le dit la chanson, elle fut longue la route qui me mena jusqu'à vous. Peu à peu entre deux brasses et quelques petites confidences, ces cœurs s’apprivoisent, se reconnaissent et finissent un soir de solitude par se dire je t’aime. Hélas, une histoire qui commence par un mensonge s’achève souvent dans la douleur. Pour reconquérir sa belle partie à un congrès de maîtres-nageurs en Islande, il s’invite comme représentant d’Israël. Il possède un beau projet, construire une piscine avec les Palestiniens. Ça tombe mal, lui qui voulait rester dans l’ombre, le voilà sur le devant de la scène. Il n’est pas sûr qu’Agathe résiste à un second mensonge. Peut-être que les sources magiques de l’Islande…

Ce que j’ai dans le cœur, brûlant comme notre âge,

Si j’ose t’en parler, comment le définir ?

Est-ce un miroir ardent frappé de ton image ?

Un portrait palpitant né de ton souvenir ?

Marceline Desbordes-Valmore - Poésie Folio

Sólveig Anspach est morte avant la fin du montage du film qu’achèvera son coscénariste, Jean-Luc Gachet. Il nous reste encore un scénario de sa main qu’un autre réalisateur mettra en images. Elle dénonce dans Haut les cœurs en partie autobiographique, son premier combat contre le crabe. Il revient nous l’enlever un beau jour dans la Drôme à 54 ans, le 7 aout 2015. Il existe des moments où l’on aimerait maudire le destin pour les promesses qu’il nous enlève. En quelques films, après un passage par le documentaire, elle imposait son propre univers. Un monde où l’amour s’invitait dans le jeu du hasard et des coïncidences pour emporter deux cœurs sur ses sommets. Nous aimions ses personnages hors des sentiers battus, petites perles de surréalisme poétique. Lulu femme nue la révèle au grand public, la critique l’avait déjà remarquée avec Haut les cœurs et confirmée avec Queen of Montreuil. L’effet aquatique se déroule dans le même univers que ce dernier. D’ailleurs Agathe est peut-être la même, allez savoir ? C’est la quête d’un amour impossible de deux vies perdues dans la valse du quotidien qui finissent par se croiser.

C’est une belle histoire d’amour impossible que les sentiments entrainent dans une sarabande folle, s’égarent et éclatent dans l’âme. C’est ce sentiment qui nous force à grandir, évoluer, dépasser nos peurs, nos phobies et les montagnes. Samir devra vaincre sa timidité. Il commence par le faire par le mensonge en se rendant compte bien vite que cela complique l’affaire. Il finira par dévoiler sans crainte ce que son cœur murmure. Agathe, jeune femme volontaire, peut-être blessée par une vieille histoire, apprendra à laisser son âme se libérer, s’ouvrir. Petit conte comme pour Lulu femme nue. C’est quand la sincérité parle qu’il grandit et déploie ses ailes papillon aux multiples couleurs de l’existence. Elle place des drôles de figures improbables, dans cette balade qui coule comme une rivière, un directeur de piscine savoureux, un caissier décalé.

Le tout s’achève dans les paysages d’Islande entre la pierre, le froid et les sources d’eau chaude à l’image du cinéma de Sólveig Anspach. Un cinéma où la poésie et la réalité composaient une jolie ritournelle du bonheur. Les personnages apprendront à se réchauffer par ce qu’ils partagent en commun. Sa mise en scène trempait sa plume dans le documentaire, le spectateur n’a aucun doute sur leur réalité. Quelque part, Samir et Agathe ont posé leurs bagages, peut-être aux côtés de Sólveig Anspach, ailleurs entre l’Islande et la France. Il nous reste ce dernier film à savourer et les autres à revoir encore et encore pour nous souvenir d’un talent perdu et si prometteur.

Patrick Van Langhenhoven