« Gardez-vous des faux prophètes qui viennent habillés en brebis et qui cachent des loups rapaces. Jésus est le berger qui vous protège et moi je suis son chien. »
Aux confins de la frontière, l’arrivée d’un homme de Dieu dissimulant l’âme d’un démon bouscule la tranquillité d’une petite ville. C’est ici que le passé et le présent se mélangent et remontent la route du temps. Hier, une âme errante abandonnée au bord de la route finit dans la bauge d’un bordel infâme où l’on vend la chair pour quelques dollars. Une putain vaut bien moins qu’un chien errant. La jeune fille perd son innocence dans le corps des hommes saouls, des cavaliers de passage dans cette nouvelle Sodome.
Comment construire un avenir, bâtir un chemin d’espérance dans les prairies du Seigneur ? Dans l’antre du diable, il n’existe nul pardon, que la damnation. On n’élève pas son âme au chant divin, elle plonge dans les sombres abimes de la perversion. On ne s’échappe pas de l’enfer sans que Lucifer ne lâche ses cohortes à vos trousses. Nulle part elle ne trouvera le bonheur. Depuis le premier cri, cette ombre de noirceur s’appuyant sur les mots de Dieu la poursuit. Elle ne construira que des illusions, des mirages, des espoirs imaginaires mourant en chimère. La folie d’un pasteur conduit par ses désirs et non la voie du Tout-Puissant est sa tombe et sa croix. C’est l’histoire de cette enfant fuyant l’assassin de sa mère, putain et mère espérant échapper à son calvaire. Entre damnation et rédemption, il n’existe que l’ombre d’un papillon dans les vergers du Seigneur.
« Tu crois que ce sont les flammes qui rendent l’enfer insupportable. C’est faux, la vraie douleur c’est l’absence d’amour. »
Brimstone est un chant de douleur sur la condition de la femme, l’amour et l’arrivée de ces prédicateurs fous entrainant leurs brebis. C’est l’espérance d’une terre nouvelle où construire une utopie basée sur la bible. Venu des Pays-Bas, chassé par la guerre et la misère, le troupeau du prêcheur a trouvé un nouvel Eden. C’est la lutte d’un homme de Dieu pris entre ses démons intérieurs, la chair et le sexe que sa femme lui refuse. Dans ce Nouveau Monde comme dans l’ancien, à la fin du dix-neuvième siècle, elle valait bien moins qu’un chien pour ces gens-là. Le pasteur peut tout se permettre au nom de Dieu, même le pire des tourments. On comprend pourquoi cette mère continue à braver la bête incarnée dans son mari. La communauté est piégée par celui qui devrait la conduire dans les verts pâturages.
La tribu ne parle plus la langue de la terre des origines. On coupe les racines pour s’inscrire dans un futur nouveau. Elle refuse de suivre la voie tracée par son mari. Elle bafoue la parole, nie l’acte de chair, Anna la mère de Liz devient une hors-la-loi. Femme démoniaque, elle est traitée comme telle. C’est l’oubli du passé face à un avenir totalitaire. Liz s’enfuit, mais n’échappe pas au poids de sa croix. Elle ne peut construire le bonheur qu’elle espère, marquée par la fureur du prêcheur. Tant qu’elle n’affronte pas le démon, il influe sur sa vie et la condamne à l’enfer sur terre. Prostituée, elle espère échapper à son calvaire en fuyant le clandé où elle était prisonnière. Les références à la bible sont nombreuses, à Sodome et Gomorrhe et aux enfers en particulier. Le film est découpé en versets, comme une bible.
La parole est une symbolique importante. Les mots sont ceux de Lucifer, du prêcheur fou et de son invocation à servir le mal. Liz devient muette, l’ange n’a pas besoin du verbe pour s’élever dans les vergers du Seigneur. C’est la longue route qui conduit hors de l’enfer que retrace le film. Les hommes de peu de foi se montrent parfois plus respectables que les hommes servant la parole divine. Il faut se méfier des apparences, elles sont souvent trompeuses. Plus que la violence physique, c’est la torture morale qui retourne le cœur du spectateur et le conduit au bout d’une piste où il devra lui aussi affronter ses terreurs. Dans le rôle du prêcheur, Guy Pearce est superbe, mais la surprise vient de la jeune Dakota Fanning et de Carice Van Houten, la mère. Martin Koolhoven réalise un western à la symbolique appuyée où l’ombre et la lumière se disputent l’âme de l’humanité.
Patrick Van Langhenhoven
Titre : Brimstone
Réalisation : Martin Koolhoven
Scénario : Martin Koolhoven
Photographie : Rogier Stoffers
Monteur : Job ter Burg
Musique : Junkie XL
Producteur : Els Vandevorst, Uwe Schott
Production : N279 Entertainment, Backup Media, X-Filme, Prime Time, Studio Babelsberg, The Farm Film
Pays : Pays-Bas, France
Genre : western / thriller
Durée : 148 minutes
Langue : anglais
Dates de sortie :
Drapeau de l'Italie Italie : 3 septembre 2016 (Mostra de Venise)
Drapeau de la Belgique Belgique : 18 janvier 2017
Drapeau des États-Unis États-Unis : 10 mars 2017
Drapeau de la France France : 22 mars 2017
Interdit aux moins de 16 ans
Distribution
Dakota Fanning : Liz
Guy Pearce (VF : Boris Rehlinger) : le Révérend
Kit Harington : Samuel
Carice van Houten : Anna
Emilia Jones (VF : Clara Quilichini) : Joanna
Jack Roth : Wolf
Jack Hollington (en) : Matthew
Paul Anderson : Frank
Carla Juri : Elizabeth Brundy
William Houston : Eli
Ivy George : Sam
Vera Vitali : Sally
Bill Tangradi : Nathan
Frederick Schmidt : le shérif Zeke
Farren Morgan : Mike
Charlotte Croft : Abigail
Baely Saunders : Jackie
Hans-Joachim van Wanrooij : Blacksmith
Adrian Sparks : le père d'Eli
Dan van Husen : le chauffeur de car
Sam Louwyck : l'agent matrimonial
Joseph Kennedy : le mari de la femme enceinte
Sue Maund : la mère d'Abigail
Naomi Battrick (en) : la narratrice