Boomerang
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En Bref
Une simple balade sur les lieux de l'enfance se transforme en boîte de Pandore. Antoine n'a pas que sa séparation à régler. Il doit aussi faire la lumière sur les zones d'ombre du passé et plus particulièrement sur la mort de sa mère. Le traumatisme du petit garçon ne s'est jamais cicatrisé, il reste des silences, des non-dits des écueils à baliser pour que le navire retrouve sa route. Antoine entreprend un long voyage dans le temps, remontant la piste du jour fatidique de la noyade de sa mère. Les albums photos, vieilles reliques jaunies, ouvrent la voie. Les souvenirs des domestiques et les siens raniment ce dernier jour avant qu'il ne s'évanouisse et meure dans le grenier de nos mémoires.
La mort l'accompagne comme un fantôme, une ombre, elle provoque les rencontres qui changeront le futur. Comme celle de cette jeune fille de la morgue, peut-être une nouvelle liaison. Auparavant, il devra s’émanciper de cette bouffée d'outre-tombe qui l'étouffe. Un père autoritaire qui ne livre rien, des sujets tabous, une grand-mère muette, Antoine ne devrait pas remuer les temps anciens, la vague charrie trop de boue. Et personne n'a envie que la mer ne ramène un autre malheur. Et quand la vérité viendra, elle n'aura pas de robe de dentelle pour les épousailles. Elle sera nue comme Ève au premier jour, et personne n'échappera à la tempête qu'elle soulève.
Tatiana de Rosnay aime les fantômes dans les placards, les secrets de famille revenant à la surface un jour ou l'autre, comme des noyés putrides. Comment se reconstruire en jouant le même jeu, en gardant fermées certaines portes ? Il faut bien à un moment ou un autre dévoiler la vérité, ne rien dissimuler, pour que les vivants avancent. Chacun se comporte de manière différente. L'oubli, la mémoire sélective, on réinvente la fabrique des souvenirs. C’est au cœur de ce jeu trouble que l’adulte qu’est Antoine cherche le fil perdu par ce petit garçon qu’il était. Dans sa volonté d’éclaircir les petits riens du passé, il soulève une tempête au fur et à mesure qu’il progresse sur le chemin de la vérité.
C’est bien le fait de se souvenir qui lui permettrait, dans la tourmente de sa séparation, de se reconstruire. Il l’entraine dans les vieux cimetières de la mémoire où gisent les morts du passé qu’il ne faut pas réveiller. Le film se bâtit en douceur, sans violence sur ce doute qui s’insinue dans son âme. Plus il avance et plus les questions du pourquoi et comment sa mère est morte remontent à la surface. Dans cette zone d’ombre, le spectateur est porté par le jeu des comédiens dans une mise en scène sans tambour ni trompette. C’est assez malin, car nous parcourons comme le héros du film, Antoine, le même chemin paranoïaque. Toutes les voies s’ouvrent devant nous, suicide, meurtre, peu à peu la vérité nous confronte à la réalité et aux blessures que ce silence génère dans le cœur de chacun. De la même façon que la quête de Sarah dévoilait l’horreur des camps, Boomerang, comme un retour à l’envoyeur, annonce la tempête des secrets cachés, des non-dits.
La vérité est parfois la meilleure des solutions, elle aide à se construire même si le cœur en prend, palpite, tremble, pleure sur le coup. Le silence emporte trop de blessures qui grandissent et finissent par apporter le vent mauvais. Après le cyclone il sera difficile de rebâtir le paysage changé à jamais. François Favrat construit un jeu de la vérité et du mensonge tout en finesse et redonne un peu de couleur à une histoire assez classique. Les comédiens, Laurent Lafitte en tête, s’appuient sur un jeu minimaliste, sans trop en faire qui renforce l’impression d’un récit qui s’insinue au plus profond sans en avoir l’air. Comme me le disait un auteur, c’est bien la façon de raconter qui fait tout.
Patrick Van Langhenhoven
Titre : Boomerang
• Réalisation : François Favrat
• Scénario : François Favrat en collaboration avec Emmanuel Courcol d'après le roman Boomerang de Tatiana de Rosnay paru aux Éditions Héloïse d'Ormesson
• Casting : Antoine Carrard
• Photographie : Laurent Brunet
• Son : Laurent Cercleux
• Montage : Valérie Deseine
• Décors : Mathieu Menut
• Costumes : Emmanuelle Youchnovski
• Directeur de production : Sylvain Monod
• Productions : Les Films Du Kiosque
• Producteurs : François Kraus, Denis Pineau-Valencienne
• Société de distribution : TF1 Droits Audiovisuels et UGC Distribution
• Pays d'origine : France
• Langue originale : Français
• Date de sortie : 23 septembre 2015
Distribution
• Laurent Lafitte : Antoine Rey
• Mélanie Laurent : Agathe Rey
• Audrey Dana : Angèle
• Wladimir Yordanoff : Charles Rey
• Lola Courty : Agathe enfant
• Bulle Ogier : Blanche Rey
• Anne Loiret : Anne-Sophie
• Anne Suarez : Astrid
• Lise Lametrie : Bernadette
• Angèle Garnier : Margaux
• Kate Moran : Jean Wizman
• Gabrielle Atger : Clarisse
• Rose Favrat : Rose
• Lou-Ann Opéron : Pauline
