La banlieue s'enflamme, un jeune homme est mort une de fois de plus dans des conditions obscures. Malika, sa sœur, n'accepte pas les réponses de la police et se lance dans un combat pour faire triompher la vérité. La famille n'est pas forcément prête à la suivre dans cette quête qui laissera forcément des cicatrices à chacun. Le père, fataliste, appartient à l’ancienne génération d'immigrés, il accepte avec résignation ce que l'Etat lui dit. La jeune génération française, blessée en son âme, cherche à ce que la justice soit équitable. C'est tout le chemin que suit Malika, refusant le mensonge pour que, dans cette République, la justice pour tous ne soit pas un vain mot. Loin de la banlieue qui s'enflamme, c'est celle des cœurs des proches, du père, de la mère, des frères et sœurs face à la mort qui intéresse le réalisateur. Ce sont les dommages « secondaires » au sein de cette famille française, touchant chacun dans son désir de justice. Le parcours de Malika devient, à travers sa douleur et son combat, une quête de vérité universelle.
Mehdi Fikri réussit un premier film synthétique, moderne, entre une mise en scène de fiction soignée, réaliste et un aspect documentaire. Mehdi Fikri voulait avant tout faire un film de cinéma avec un sujet flamboyant et romanesque. Mais il était important de revenir à la réalité par ses images brutes à la fin, non mises en scène, pour clore la boucle fictionnelle. Il s'inspire de plusieurs affaires, dont celles d'Adama Traoré, Nahel Merzouk, Hedi, Lamine Dieng. Le film explore avant tout la famille et sa douleur face à ses répercussions sur chacun de ses membres. De Malika la combattante à Mohamed le père, chacun s'inscrit d'une façon particulière dans une recherche de vérité. Avant que les flammes ne s’éteignent ne cherche pas à être à charge mais à explorer un aspect particulier de ces affaires. Le biais de la fiction sert avant tout à créer une galerie de personnages comme le frère, Driss, à la limite de la légalité.
Nour, la petite sœur, refuse de s'impliquer, comme le père qui souhaite tourner la page rapidement. Chacun devra faire face, avec ses blessures anciennes, son regard sur la France d'aujourd'hui. C'est la question de la montée des violences policières, des Gilets jaunes aux nombreuses affaires mettant en cause des policiers. Ces derniers ne sont pas le sujet du film et peuvent faire l'objet d'une autre fiction. Certains verront un engagement politique plutôt à gauche du réalisateur. Il est important de voir le film qui est fait et non celui que l'on aimerait voir. Comme pour Nos frangins de Rachid Bouchareb sur Malik Oussekine, c'est comment la famille réagit face à une mort suspecte. On retrouve Samir Guesmi, déjà présent dans ce dernier. Il est important de soulever la question et de s'interroger sur un nombre d'affaires de plus en plus nombreuses impliquant des jeunes Français issus de l'immigration.
Comme le dit Mehdi Fikri : « Les violences policières sont devenues le cœur battant de la vie politique française. Cette question regroupe tout : le déni du malaise post-colonial, la gestion sécuritaire des quartiers, le refus du dialogue social en période de crise économique et la violence qui découle de tout cela. J’ai voulu en parler mais depuis l’intérieur, depuis l’intimité d’une famille française. ». Le président en campagne dit : « Il ne peut y avoir d'autorité dans les quartiers, sans autorité dans l'Etat. Une bavure policière doit donner lieu à une réponse, une sanction ». Aujourd'hui, il dit : On ne peut pas avoir de violence policière dans un Etat de droit ». Avant que les flammes ne s’éteignent est aussi une histoire de deuil. C'est un film qui mêle l'intime et le politique. Il nous rappelle que pour commencer à guérir, il faut nommer les choses. Dans un monde où la violence déborde de plus en plus, il est important de s'interroger sur ses racines dans la société.
Patrick Van Langhenhoven
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Titre original : Avant que les flammes ne s'éteignent
Réalisation : Mehdi Fikri
Scénario : Mehdi Fikri
Musique : Andrea Boccadoro
Décors : Laure Satgé
Costumes : Annie Melza Tiburce
Photographie : Romain Carcanade
Son : Cédric Berger
Montage : Béatrice Herminie
Production : Michaël Gentile, Garance Boulet, Robin Robles, Arthur Goisset et Bastien Daret
Sociétés de production : The Film, Topshot Films, France 3 Cinéma et Bac Films
Société de distribution : Bac Films et Goodfellas
Pays de production : France
Langue originale : français
Genre : Drame
Durée : 94 minutes
Dates de sortie : 15 novembre 2023
Distribution Camélia Jordana : Malika, sœur de Karim
Sofiane Zermani : Driss, frère de Karim
Sofian Khammes : Adel, beau-frère de Karim
Sonia Faidi : Nour, sœur de Karim
Louise Coldefy : Estelle
Makita Samba : Harchi
Hammou Graïa : Mohamed, le père de famille
Samir Guesmi : Slim
Larry : Karim, plus jeune fils de Mohamed
Distinctions 2023:
12e Festival international du film indépendant de Bordeaux : ouverture, hors compétition
48e Festival international du film de Toronto : présentation section Discovery
18e Festival international du film de Rome : en compétion